Quel film de fou…
Je m’étais potentiellement préparé à voir un grand film mais alors là… c’est bien plus grand que ce que je pouvais imaginer.
Déjà la première vraie force du métrage c’est sa mise en scène et sa photo. Wim Wenders et son chef op arrivent à sublimer ses immenses espaces désertiques à perte de vue, il y a un réel sentiment de liberté qui se dégage qui est d’ailleurs l’un des principaux thèmes du film, même dans les espaces clos il y a toujours une porte ou une fenêtre qui va donner sur un immense espace extérieur. Il y a juste les moments où Travis et Jane se retrouvent qui se passe dans un espace réduit et ça fait terriblement sens, eux qui ont été prisonniers de l’amour qu’ils partageaient.
La lumière est superbement gérée, chaque plan est un tableau, les plans de nuit sont absolument magnifiques notamment ceux à Houston filmés en contre plongée de ces immenses gratte-ciels.
Dès le début on est happés par l’histoire, tant de question sans réponse et le jeu d’Harry Dean Stanton sans un mot est dingue. Il ne dit rien mais on comprend beaucoup de choses, l’invisible est filmé. Surtout dans cette scène au diner où son frère va évoquer Jane pour la première fois, on sent à la fois de la honte et des remords.
On va, au fur et à mesure, s’attacher au personnage de Travis qui qui n’a plus aucune estime de lui, qui a tout abandonné, y compris son fils, pour une raison qu’on ignore.
Wim Wenders va encore plus créer l’empathie via la relation qu’il tiendra avec son fils qui va se renouer au début du film. On va être sur la route avec eux ensuite quand ils seront à la recherche de Jane, le duo marche super bien, on sent que Travis aime son fils par dessus tout et il y a une réelle alchimie entre les acteurs (et ça marche pour tous les acteurs du métrage).
On va donc être 2h avec Travis, le voir évoluer, prendre de l’aplomb pour que son fils soit fier de lui et pouvoir renouer le dialogue et profiter de lui (dans le bon sens du terme ahah).
Et ce point d’attachement qu’on aura avec Travis va atteindre son sommet lors de cette MAGNIFIQUE séquence (et je pèse mes mots) où il va tout expliquer à Jane, il va raconter cette histoire qu’ils ont eu et on va ressentir tout l’incommensurable amour qui a pu les habité (ou que les habite toujours quelque part?).
(petite parenthèse pour dire que Wim Wenders va bien nous frustrés et va mettre des vraies scènes de suspens (comme quand il va au lieu de travail de Jane pour la première fois) jusqu’à ce moment-là, on sent qu’il y a une tonne de non-dits et que Travis a besoin de vider son sac.)
Et c’est là où Wim Wenders va être vicieux, c’est que ce personnage auquel on s’est attaché et qu’on a vu évolué va s’avérer être un immense connard qui a exercé une violence sur Jane, qu’elle soit physique ou psychologique, on va voir tout ce que l’amour peut apporter de pire, l’envers du décor. Cet amour qui semblait parfait en tout point a été gâché par la jalousie et le manque de confiance en soi. Et l’enfant qui a été conçu pour les mauvaises raisons n’a fait qu’envenimer les choses, jusqu’à ce que Travis fasse l’impardonnable et ira fuir, ronger par la honte et la culpabilité.
Toute cette séquence est magnifié par la mise en scène de Wim Wenders, aucun plan n’est laissé au hasard, tout est géré d’une main de maître.
Petit mot sur la musique que j’ai trouvé très jolie, ça aurait pu être très vite cliché mais elle est toujours utilisée intelligemment.
Et puis Natassja Kinski dans le rôle de Jane, que je connaissais pas du tout avant ce film, crève l’écran, magnétique et mise en scène magnifiquement, elle détruit tout sur son passage.
Paris, Texas est un vrai film sur l’amour et à quel point il peut être destructeur et à quel point on peut en être prisonnier. L’amour est une chance comme il peut être un poison.
Je pourrais en parler des heures, je fais cette critique à l’arrache le lendemain de mon visionnage, j’ai peut-être dit beaucoup de merde c’est possible ahah, mais c’était incroyable. Hâte de voir le reste de la filmo de Wim Wenders du coup et sans doute la meilleure Palme d’Or que j’ai pu voir jusqu’à maintenant.