Je ne savais pas trop à quoi m’attendre en allant à l’AVP de Poor Things (Pauvres Créatures en français). Il faut dire que je ne connais pas bien le réalisateur, Yorgos Lanthimos, je n’ai vu que The Lobster de ce dernier. Que j’avais bien aimé, j’avais beaucoup aimé le concept et ce que le réalisateur en faisait.
Je peux donc dire que j’y allais sans aucune réelle attente même si j’étais au courant pour le Lion d’Or à Venise et que j’avais vu quelques images du film qui avait titillé ma curiosité sans savoir ce que le film allait me raconter, je ne savais même pas que ça allait être une re-visite du mythe de la créature du Dr. Frankenstein.
Et je dois dire que je suis très agréablement surpris par le film! Surtout la première heure et demie qui est absolument parfaite.
Dès la première image on sait qu’on va en prendre plein les mirettes durant tout le film. Que ce soit le noir et blanc qui est déjà magnifique mais d’autant plus quand la couleur va apparaître dans le métrage et déjà là Yorgos Lanthimos va utiliser son concept de manière brillante : on va découvrir tout cet univers en même temps que Bella Baxter, notre personnage principal.
Et on peut tout de suite dire que la découverte de cette DA et de ces couleurs pétantes sont un délice pendant 2h20, on sera tout autant fasciné que Bella sur ce point, l’utilisation de différentes focales va accentuer cette sensation, tout parait immensément grand.
On sent beaucoup d’influence cinématographique dans l’univers que Lanthimos nous dépeint, de Jeunet à Del Toro en passant par Cronenberg, il digère ses références pour en un faire un univers avec sa propre identité.
Mais le concept du film (donc un enfant dans un corps de femme adulte, concept génial par ailleurs, « Big » le faisait déjà mais je n’ai pas vu le film et ça a l’air d’être bien plus ciblé pour les enfants) va aussi être superbement utilisé dans sa satire sociale de notre époque. Ce monde qui ressemble étrangement au nôtre.
Yorgos Lanthimos va mettre cette société face à ses contradictions via la naïveté de Bella et ce sera toujours fait de manière intelligente, il se concentre beaucoup sur l’aspect féministe (ce qui peut lui être reproché dans le seconde partie du film où il assène un peu trop facilement son message selon moi et où son scénario ne sera qu’au service de son propos malheureusement) mais dans la première moitié du film tout y passe et on y verra toute la cruauté, la cupidité et l’opportunisme de l’être humain, tout en oubliant pas d’être nuancé sur certains points. Ce sera donc dans un premier temps un film très cynique, on va donc tantôt en rire pour expier toute l’horreur du monde dont fait face Bella, tantôt compatir avec elle et avoir pitié de sa naïveté.
Inutile de souligner les acteurs tant ils sont tous géniaux, Emma Stone en première ligne qui a peut-être là son meilleur rôle. L’Oscar est possible pour elle, même si en vrai on s’en fout un peu des Oscars, elle est absolument bluffante en fille dans un corps d’adulte, elle a donné son corps au film et est absolument époustouflante.
J’adore toujours autant Willem Dafoe et je l’aime encore plus dans ce personnage qui est un immense connard sur bien des aspects mais qui est réellement attachant que ce soit grâce à sa performance ou grâce à l’écriture de son personnage.
L’écriture est aussi une grande force du métrage, jamais tout noir ou tout blanc, les personnages seront toujours nuancés, de toute façon ça n’aurait pas marché sans la qualité d’écriture du film. Même le personnage de Mark Ruffalo qui peut être vu comme l’antagoniste du film à sa part de « bon ».
Je l’ai rapidement évoqué plus haut mais le film se perd un peu dans sa dernière partie et toutes les péripéties qui semblaient naturelles jusque là le semble de moins en moins et Yorgos Lanthimos veut peut-être trop surligner son message déjà pas très subtil à la base et on sent un scénario plus forcé pour souligner tout ça, là où ça semblait mieux construit au début du film.
Tout cela reste du chipotage je pense, tant tout le reste est maîtrisé et que ça reste hyper plaisant à suivre, que ce soit visuellement ou pour tout ce dont le film parle. Foncez le voir, il vaut le coup !