Esthétique toujours irréprochable, que dis-je, fondante, avec une maitrise du cinémascope qui me ravit à chaque fois. L'accord parfait entre les courbes du corps féminin et l'horizontalité du cadre; les contrastes entre les lignes douces que les couleurs pastel et la pâleur des peaux laiteuses soulignent et les profondeurs ténébreuses que proposent ici ou là les décors intérieurs; les nombreux va-et-viens des personnages dans le cadre (gauche, droite, centre) malgré leur immobilité, tous ces éléments se juxtaposent pour louer l'astuce et l'imagination de la caméra de Masumura. C'est beau, du premier au dernier plan, recherché, renouvelé, époustouflant pour tout dire.
Cependant l'histoire ne m'a pas plu des masses. Peut-être une lassitude passagère due à une thématique sur l'obsession, la mythification amoureuse, les excès de la passion que j'ai un peu trop goûté dernièrement? Je crains que ce ne soit l'outrance des personnages, leur agitation aussi bien dans les francs élans comme dans le jeu subtil de séduction ou bien encore dans la manipulation perverse de l'autre. Un peu trop criard. Je n'ai pas été ébloui par le jeu des comédiens. Il n'y a guère qu'Ayako Wakao dont la beauté sidérante n'est pas le seul atout, bien heureusement, qui m'a semblé offrir une performance convenable.
Il faut toutefois saluer encore une fois la hardiesse et le courage du cinéaste. Ici, dans un Japon encore en proie aux obstacles de la tradition en 1964 (qui aurait pu en faire autant en France à la même époque?), il met en scène une histoire d'amour passionnée et de sexe entre deux femmes. Avec distinction et finesse.