C'est un fait il faut que je m'y résolve : le cinéma de Otar Iosseliani me laisse toujours un peu froid, un brin en retrait. Souvent j'ai l'impression de me forcer à trouver de l'intérêt un peu théorique là où le visionnage s'est avéré un peu poussif et ennuyeux. Cela aura été davantage le cas ici dans "Pastorale" sans doute à cause des choix de sous-titrage qui m'ont beaucoup dérangé : il paraît que c'est ce qu'a souhaité Iosseliani lui-même, mais une grande quantité d'échanges entre les personnages, notamment lors des querelles et lorsqu'il y en a beaucoup en interaction, ne sont tout simplement pas sous-titrés. C'est un choix que je trouve étrange (même si je ne ferai aucun procès en illégitimité, la démarche de l'auteur est évidemment à respecter), car déjà on se demande sans cesse s'il n'y a pas un problème technique avec la copie que l'on regarde et au-delà de ça, même si cela pousse à se focaliser sur autre chose, j'ai le sentiment de passer à côté de beaucoup de subtilités (quand bien même ce serait également le cas dans la logique d'une traduction qui pose toujours problèmes, on n'est pas non plus en train de traduire de la poésie).
Toutes ces tergiversations n'abordent pas la question qui anime "Pastorale", très simple, entièrement dévouée à l'observation de la perturbation d'un microcosme par un autre, tandis qu'un groupe de musiciens de la capitale débarquent dans un petit village rural pour effectuer des répétitions pendant quelque temps. On est vraisemblablement dans un kolkhoze, donc très rapidement la question de la satire s'invite dans le chaos d'inimitiés qui structure la majorité des dialogues. Le film carbure en effet à la boutade, à la bêtise, et au sarcasme à peine voilé lorsque, un exemple parmi beaucoup d'autres, on interdit à des paysans de faucher le blé qui constitue peu ou prou leur survie là où on autorise une personne plus fortunée à pêcher à la dynamite. Le principal moteur de la comédie, ce sont les controverses locales, incessantes, dans lesquelles se trouvent embrigadés les quatre musiciens. Si l'on ajoute à cela pas mal de picole, on comprend que la réunion de la ville et de la campagne ne va pas se faire dans le calme et la sérénité.
On navigue sur un territoire qui fait parfois penser à du Tati slave, sensation renforcée par le caractère approximatif du sous-titrage et par le mixage sonore, qui donne parfois l'impression de regarder un muet étrange. Au final Iosseliani donne l'impression d'agir en tant qu'observateur du quotidien des habitants de ce petit village, rythmé essentiellement par des chamailleries diverses et par la captation, certes indirecte, d'une variété de gestes paysans.