Twin Peaks
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le 24 déc. 2016
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Après avoir fait l'impasse en salles sur le sublime Only Lovers Left Alive, il était impensable que je fasse de même avec le nouveau film de Jim Jarmusch. On retrouve sa poésie à travers le personnage interprété par Adam Driver, tout comme dans ses plans et la simplicité de cette oeuvre sublimant le quotidien de la vie.
Paterson est une ville de l'état du New-Jersey, mais aussi le prénom du personnage principal. Elle semble d'un autre temps, en décalage avec la modernisation de notre société. Il en va de même pour Paterson (Adam Driver), se réveillant avec les lueurs du soleil, écrivant ses poèmes sur du papier et ne possédant pas de mobile. C'est un chauffeur de bus se réveillant tout les jours au creux de la belle chevelure de Laura (Golshifteh Farahani). Sa vie est réglée comme une horloge, il se contente de peu et trouve son bonheur auprès de Laura, des gens et des mots.
Le quotidien au sein d'un couple est vu comme un ennemi, alors qu'il peut aussi être une source de réconfort. L'évolution de notre société, nous pousse à la surconsommation avec un besoin permanent de nouveautés, en ne prenant pas le temps d'apprécier le temps qui s'écoule auprès de celle ou de ceux qu'on aime. Ce film va à contre-courant de ce siècle, en nous contant la vie d'un couple semblant en apparence banal. Un chauffeur de bus écrivant de la poésie, cela semble à priori inconcevable, mais connaissons-nous vraiment ceux que l'on côtoie au quotidien, pourquoi n'auraient-ils pas une fibre artistique, même si leurs emplois semble peu propice à mettre en ébullition leurs esprits. La poésie se trouve partout autour de nous, il suffit d'ouvrir les yeux et nos oreilles pour sentir son parfum. Paterson la voit dans une bouteille d'allumettes, mais aussi dans les échanges entrent ses passagers et dans le bar ou il prend le temps de se détendre. Il est sensible au monde qui l'entoure et surtout à sa femme, qui a aussi son propre univers en noir et blanc.
Chaque jour, on assiste à la même journée, comme si on était dans Un Jour sans Fin. Paterson se réveille, sa femme lui raconte son rêve, il mange ses céréales, pose ses mots dans son carnet avant de prendre son service, balade leur chien Marvin et boit une bière dans un bar. Alors que le bus prend le pouls de la ville en journée, le bar prend celui de la nuit. Les gens se racontent, s'inventent des vies, créaient des drames ou font l'éloge de ceux qui ont grandi dans cette ville. Lou Costello en est la figure emblématique, mais c'est surtout le poète William Carlos Williams natif de Rutherford mais dont Paterson est considérée comme une oeuvre majeure, qui est mis en lumière. On croise aussi d'autres artistes avec des clins d’œil à Paul Auster, Rubin Carter, Iggy Pop et Sam & Dave.
Cela ressemble à Ghost Dog, avec un héros mutique suivant sa vie selon des habitudes bien définies. Sa rencontre avec une jeune fille écrivant aussi de la poésie participe à ce rapprochement, tout comme la présence de Method Man, à la place de RZA. Une autre rencontre en pleine rue continue de faire de ce film, une version tendre d'un de ces films majeurs. C'est surtout une oeuvre minimaliste ou tout se déroule en douceur dans une ambiance smooth and jazz. Jim Jarmusch filme le quotidien de ce couple avec délicatesse, en épurant son style mais sans omettre une touche distrayante à travers le bouledogue Marvin et Donny (Rizwan Manji). Il met de la poésie dans ses plans et dans les mots provenant de la plume d'un de ses poètes contemporain préféré Ron Padgett.
Un couple, un chien, des rêves, des mots, un bus, un bar, le printemps et des rencontres inattendues constituent ce film à la simplicité des plus agréable. Un Jim Jarmusch tout en douceur pour finir l'année sur une tendre note avec un beau couple Adam Driver et Golshifteh Farahani.
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Créée
le 22 déc. 2016
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