Twin Peaks
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Durant sa carrière, Jim Jarmusch s'est toujours distingué avec des films prenant racine dans un univers intimiste et léger duquel émergent une poésie et une certaine mélancolie. "Paterson", sa nouvelle réalisation, s'inscrit parfaitement dans cette veine et nous invite à suivre, pendant une semaine, la vie de Paterson, conducteur de bus et poète à ses heures perdues. De ce quotidien banal, Jarmusch parvient à en extraire cette petite dose de magie et d'extravagance qu'il aime tant.
La première chose qui vient en tête en repensant au film, c'est sa répétition constante. La répétition d'un quotidien bien huilé, incarné par des faits et gestes précis qui recommencent chaque jour (Paterson qui se réveille à 6h du matin, Paterson qui conduit son bus sur la ligne habituelle, Paterson qui sort son chien au soir et fait un détour au bar pour prendre un verre,...).
À travers ce schéma de répétition au rythme assez lent, qui pourrait d'ailleurs rebuter les amateurs de films aux intrigues calibrées et mouvementées, Jarmusch parvient à retranscrire visuellement cette fameuse expression : métro-boulot-dodo. Cependant, aucune critique acerbe ou misérabiliste n'est portée sur cette banalité du quotidien. Au contraire, si Jarmusch se moque parfois gentiment de ses personnages et de leur mode de vie, on sent qu'il leur porte avant tout un véritable amour et respect. Car avec ce film, le but du réalisateur est justement de montrer la beauté du monde à travers le quotidien, concept qui se retrouve symbolisé à travers les poèmes de Paterson.
De plus, la répétition permet au film de mettre en exergue tous les éléments venant perturber celle-ci. Ce qui fait que lorsque se produit un événement anodin, mais inhabituel (une rencontre fortuite, un aléa, un changement dans la planning), celui-ci prend une proportion presque démesurée tant il bouleverse un rythme de vie réglé au millimètre près. Ce sont d'ailleurs lesdits événements qui inspirent Paterson et le poussent à écrire ses poèmes. Finalement, on peut dire qu'en partant d'un rien, Jarmusch nous donne quelque chose de beau et grand.
Si Paterson est le nom du héros, c'est également celui de la ville (qui existe vraiment!) dans laquelle se déroule l'action. On peut donc voir que, comme à son habitude, Jarmusch s'amuse à planter le décor de son film dans un lieu historique regorgeant de souvenirs et d'histoires en tout genre. Ceux-ci donnent alors à l'ensemble un aspect mélancolique, voire fantomatique. C'est ainsi que le film, et son héros bien évidemment, sont continuellement habités par la présence invisible de Williams Carlos Williams, célèbre poète ayant vécu à Paterson.
Cependant, si on retrouve dans Paterson les thèmes chers à Jarmusch, on regrettera que le film, malgré ses nombreuses qualités, n'arrivent jamais à atteindre la beauté visuelle (voire même la puissance émotionnelle) des précédentes oeuvres du réalisateur.
Film insolite et délicieux , Paterson cache donc, derrière sa simplicité, une poésie (littéraire et visuelle) des plus envoûtantes...
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le 9 déc. 2016
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