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Une ode surréaliste et cynique à la pédophilie et à la prostitution

Sur le papier, un canevas en or: la découverte du monde et de la condition féminine à travers les yeux d'un bébé dont le cerveau a été greffé dans la tête de sa propre mère, suicidée pour échapper à une vie de servitude.


A l'écran, le film passe complètement à côté de son sujet: au lieu d'interroger la profondeur du lien mère-fille, l'héritage génétique ou psychique, le désir de vengeance, la haine des hommes qui peut surgir au fil des oppressions, et la beauté des femmes qui se libèrent et s'entraident, on a droit à quoi?


A Bella qui trouve le chemin de l'émancipation à travers la levrette, d'abord avec un don juan libidineux, puis au bordel. Et qui expérimente la solidarité féminine en se faisant exploiter par une mère Maquerelle qui la fait bosser pour 20 balles. Quant à l'amitié entre femmes, elle se résume à se passer des bouquins et se bouffer la chatte. Donc 2H20 pour voir Bella se faire baiser, dans tous les sens du terme, c'est un peu long. On aurait gagné du temps ( et perdu un oscar à venir pour l'actrice, qui joue très bien ), si dès le début du film, le personnage avait été informé par son créateur de ses origines ( au lieu de cela, celui-ci choisit de la livrer en pâture au notaire libidineux, et le laisse l'emmener en voyage, très cohérent avec l'instinct paternel revendiqué par le personnage ).


En parlant d'instinct paternel....de bout en bout il n'est question que d'hommes qui abusent ou rêvent d'abuser sexuellement une femme qui a un niveau de conscience équivalent à celui d'un bébé ou d'une handicapée. Est-ce une manière de démontrer à quel point les hommes sont d'immondes prédateurs? Ou est-ce une éloge déguisée de la pédophilie? Le message subliminal est-il: faites l'amour avec des enfants, des handicapés ou des personnes ayant un TDI ( trouble dissociatif de l'identité ), c'est beaucoup + jouissif, vu qu'ils n'ont pas de préjugés, pas de limites, on peut tout leur faire !


Et que dire du point de vue sur la prostitution au bordel? Elle est dépeinte comme relevant du viol, mais un viol qui ne fait pas pleurer, ne fait pas trop mal et ne laisse aucune séquelle physique ou psy, puisque Bella n'a pas l'air d'être trop perturbée quand elle se fait prendre violemment à sec par un inconnu qui pue, sans le moindre "préliminaire". Il faut en conclure quoi? Que oui, dans certains contextes la prostitution c'est du viol, que oui, les hommes sont des gros porcs, mais qu'au final ce n'est pas grave puisque les femmes l'encaissent très bien, sans états d'âme, mais c'est dans leur ADN n'est ce pas? ( quant au fait de savoir si elles ont une âme, vaste question lol )


A la fin du film -spoiler- Bella se protège de l'ancien mari violent de sa mère en lui greffant un cerveau de chèvre, mais en attendant , les chèvres ce sont toutes les femmes au bordel qui consentent à se faire traiter comme du bétail en se planquant derrière l'argumentaire soit-disant socialiste et 100% néo-libéral "Nous sommes notre propre outil de travail".


Et à tous les hommes (et femmes?) qui arguent que c'est un film "féministe", je vous propose l'expérience suivante: allez dans un backroom, faites vous sodomiser à sec par des mecs qui vous répugnent pour 20 balles, puis revenez nous dire si vous vous sentez + émancipé(e), et si vous renouvelleriez l'expérience.... :/


Enfin, la question qui reste en suspens est: comment le personnage de Bella, si prompte à casser des assiettes, coller des baignes aux hommes dès que quelque chose dans leur comportement lui déplaît, peut-elle accepter au bordel de se laisser fourrer par des indélicats sans broncher?? La cohérence scénaristique aurait voulu qu'elle se rebiffe, ou organise une mutinerie avec ses collègues, mais la misogynie (?) du discours et le poncif de l'éternelle docilité féminine semblent l'emporter sur toute logique narrative et velléité de rébellion.


Vous noterez bien qu'au début du film, le personnage s'énerve souvent et se comporte comme une enfant, mais dès l'entrée au bordel elle s'adoucit et devient une feeemme. Non, aucune misogynie, vraiment !


Faut-il parler des décors de synthèses qui sont moches? Une étoile pour la performance de l'actrice, et les quelques rares moments comiques du film. Pour le reste je suis sortie de la projection avec un léger sentiment de malaise, que je ne parvenais pas à identifier. Le malaise vient de la manière cynique, vulgaire et sans empathie dont est filmée l'héroïne, et de l'incertitude sur les convictions du réalisateur et le message qu'il souhaitait faire passer.


Si j'étais parano je soupçonnerai ce film d'être une vaste blague misogyne destinée à faire rire des boeufs misogynes, saupoudrée de quelques discours désuets pour être étiquetée féministe et avoir droit de séjour en festivals... Mais même pas l'impression que le réalisateur cherche à convaincre qui que ce soit de ce soit-disant parti-pris féministe, au contraire il parodie ouvertement les doctrines émancipatrices en les poussant jusqu'au-boutiste dans sa mise en scène sordide. En un mot, on appelle ça du foutage de gueule...


Surréaliste, "Pauvres créatures"? Oui, de tous points de vue...

Guraja
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le 31 janv. 2024

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