Aller vers ses rêves ou se résoudre à les abandonner ?

Les liens entre Pearl et X sont tellement forts que je ne pouvais qu'utiliser le même titre pour ma critique de ce deuxième film de la trilogie de Ti West qui se conclura après ce retour en arrière, avec MaXXXine, suite directe de X.

Après avoir superbement fait revivre les années 80, voilà que c'est le cinéma des années 30 qui s'incarne dans ce préquel. Couleurs vives et saturées pour s'ouvrir sur la même ferme, terrain des agissements macabres de X. La filiation est immédiate et Ti West nous propose une mise en scène encore inspirée qui dénote avec la jeunesse qu'on imagine déjà torturée de cette jeune fille prisonnière de la campagne. Et c'est peu de le dire car c'est dans la joie et la bonne humeur que les rêves de gloire de Pearl nous sautent aussi vite au visage que sa noirceur intérieure. On se doute évidemment que pour devenir la vieille dame dérangée et massacreuse de X, il fallait un terreau fertile, mais difficile d'anticiper avec quelle aisance et quel sens de la narration Ti West allait faire vriller son personnage. C'est simple, Pearl nous horrifie sans jamais être une véritable bobine d'épouvante (on lorgne plutôt vers le thriller psychologique) et le film trouve son sinistre souffle encore une fois dans son ambiance pesante et malsaine jusque dans des détails insipides.

Si dans X, Maxine se faisait ironiquement voler la vedette par son bourreau décrépi, autant dire que Ti West finit de braquer les projecteurs sur son personnage et ses troubles mais il faut avouer qu'il ne pouvait pas le faire sans son actrice.

Mia Goth transperce littéralement tous les plans. Affublées de son accent sudiste, elle laisse aussi bien déborder la lumière que la noirceur qui habitent son personnage jusqu'à nous emprisonner véritablement dans deux scènes absolument parfaites.

Et tout le casting contribue à cette immersion. Que ce soit la terreur enfermée dans le corps immobile de son père (Matthew Sunderland) dont les yeux témoignent sans cesse de son impuissance face à ce qui se joue, ou la froideur castratrice de sa mère (Tandi Wright), chacun des acteurs contribue parfaitement et à sa façon à mener notre douce psychopathe vers sa véritable nature.

Pearl explique donc X et les deux films se complètent parfaitement, à tel point que les découvrir dans un sens ou dans l'autre (chronologique ou de sortie) doit véritablement changer l'eXpérience de visionnage. Mais pour moi Pearl surpasse X et réussit même l'exploit de le magnifier.

Ti West exploite avec brio la folie naissante de cette jeune fille prête à tout pour changer de vie. Le réalisateur ne manque pas d'idées et d'images pour souligner visuellement la déliquescence intérieure de son personnage et cela fait de Pearl une réussite horrifique comme j'en ai peu vu et qui finit d'asseoir son réalisateur comme quelqu'un à suivre.