“Quand je serai grande, je serai une fille”, répète Sasha depuis qu’elle a 3 ans. Sasha est une petite fille comme les autres sauf qu’elle est née garçon. Malgré la présence d’une famille bienveillante, la vie de Sasha est compliquée. La fillette doit faire face à l’incompréhension des jeunes de son âge mais aussi, plus dur encore, au refus d’être acceptée par certains adultes, en premier lieu par les enseignants de son école primaire (qui ont refusé d’être dans le film) ou par sa professeure de danse. Les parents de Sasha tentent de tout mettre en œuvre pour que la dysphorie de genre – terme employé dans ce genre de situation – soit reconnue est acceptée par les institutions. Un terme encore nouveau, pour un cas de figure encore méconnu de la psychiatrie et qui peut apparaître dès le plus jeune âge comme on peut le voir à travers ce film documentaire absolument bouleversant de Sébastien Lifshitz.
Il aura donc fallu beaucoup de courage aux parents et aux frères et sœurs de Sasha et bien sûr à Sasha pour accepter que la caméra du réalisateur vienne filmer et raconter les tourments vécus par cette famille, pour suivre les allers et retours entre leur petit village des Hauts-de-France et la capitale afin d’y rencontrer des pédopsychiatres formés pour ce type de situation.
La caméra toujours aussi pudique de Sébastien Lifshitz film tout ça avec une grande douceur, avec la distance nécessaire quand cela s’impose, s’arrêtant souvent assez longuement sur le visage innocent, parfois inquiet, parfois heureux, parfois soulagé, parfois incrédule de cette petite fille pas comme les autres qui a envie de vivre sa condition de fille comme les autres.
La caméra de Sébastien Lifshitz fait encore une fois des merveilles avec une mise en scène précise, élégante et sensible, un sens du cadre et de la photo parfaits. Le réalisateur, qui a suivi la famille durant plusieurs mois, laisse la parole aux différents membres de la famille, tous aimants et compréhensifs, face caméra comme chez Depardon, pour se confier sur leurs doutes, leurs interrogations, leurs incompréhensions, pour dire comme ils vivent au quotidien ce “combat” pour faire permettre à Sasha une enfant comme les autres.
Petite fille est un documentaire poignant et nécessaire, qui pose pas mal de questions à la fois médicales et éthiques, et qui devrait, en tout cas, permettre de faire avancer les choses sur la question de la dysphorie de genre. Un film qui permettra aux familles qui vivent ce genre de situation de se sentir moins seules, moins désarmées face à une partie de la société qui refuse encore de reconnaitre la situation des personnes transgenres.
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