« L’enfant »
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Le film commence par un déménagement sur lequel le spectateur n’aura aucune information. Le plan le plus évocateur sera ce travelling de la famille décomposée sur le pont, traînant ses affaires, mais le spectateur ne sait pas d’où cette famille part ni où elle va ni au sens propre ni au sens figuré.
Cette absence de repères définira la suite du film. Nous suivons Johnny, le fils de la famille, la plupart du temps errant dehors ou à l’école. Les quelques scènes où il arrive enfin chez lui se définissent par des plans serrés et furtifs, empêchant au spectateur de se figurer mentalement cet appartement. Cela donne la sensation que Johnny n’a pas de domicile. Je pense par exemple à cette scène où Johnny va enfin s’endormir chez lui… pour être transposé brutalement sous sa table d’écolier dans le plan suivant. Le moment où enfin notre oeil aura le temps de s’habituer à un logement, ce sera celui de l’instituteur où Johnny prend l’habitude de se rendre.
Cette absence de repère spatial, ou plutôt cette recherche d’un nouveau chez soi de Johnny, s’accompagne d’une recherche de repère plus symbolique, qu’on pourrait assimiler à la recherche d’une figure paternelle. Cela va même plus loin et se rapproche de la recherche d’une croyance. Très vite, Johnny demande à ne plus suivre les cours d’éducation religieuse. Cette recherche le mène également chez l’instituteur admiré.
Le récit prend alors la tournure d’un chemin initiatique, presque biblique. Johnny veut fuir ses origines. La scène où il l’annonce à sa famille possède une énergie et une colère proches d’un exorcisme où ce n’est pas le mauvais esprit qui sort du corps mais toute son origine sociale. L’ « ange », comme sa mère l’appelle, ira même jusqu’à vouloir offrir son corps pour échapper à sa condition. Le malaise que cela crée accompagne tout le film et reste longtemps difficile à interpréter. Le film se conclut sur une scène de danse de Johnny, seul dans sa chambre devant son miroir. Il y a quelque chose de l’ordre du travestissement dans cette scène, non pas sexuel mais social. Johnny vient d’annoncer à sa mère alcoolisée et endormie qu’il irait dans un collège réputé l’année suivante. Sa voie est trouvée, il peut rêver d’échapper à son destin de prolétaire qui lui garantissait un « métier de merde ».
Le film possède une grande énergie grâce à l’excellente performance de tous les acteurs secondaires mais surtout à l’insouciance des enfants qui rythme la première partie du film. C’est surtout un plaisir de suivre Aliocha Reinert tout au long du film, qui m’a permis de retrouver quelque chose des premiers films de Céline Sciamma que j’avais perdu depuis quelque temps. Une grande fraîcheur.
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Créée
le 17 mars 2022
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