Les réalisateurs français passent leur vie en thérapie
Bon...
Après on va s'étonner que je ne regarde plus de films français contemporains...
Cela dit techniquement le film est assez irréprochable voire même bluffant, très jolie photo, très jolis travellings, très belle plage bretonne. Un petit côté Amélie Poulain d'avant-garde (avec plein de voix-off qui parlent d'éléments anecdotiques pour caractériser les personnages), une petite ambiance, une petite poésie de comptoir, et un petit symbolisme lourdingue...
Et un montage étonnant, à la Tarantino période pulp fiction/Jackie Brown. Le film est un puzzle composé de morceaux éparpillés dans tous les sens avec de nombreux sauts dans le temps... Que le spectateur devra pouvoir reconstituer.
Ainsi, et c'est plutôt bien foutu, on peut revoir la même scène sous différents angles/points de vue, même mieux, le même décor (la plage) donne lieu à des scènes différentes qui se déroulent simultanément et qui se recoupent parfaitement entre elles.
Il y a également un systématisme dans la mise en scène qui consiste à inverser en permanence les causes et les effets.
Par exemple, on va voir des personnages se gueuler dessus (très cinéma français ça), et on ne comprendra pas pourquoi. C'est bien plus tard, qu'on découvrira les raisons profondes de l'embrouille. Franchement quel intérêt ?
Au bout du compte, toute cette esbroufe n'est-elle pas à l'oeuvre pour déguiser un terrible manque d'idées, et d'histoire à raconter ?
Alors de quoi ça parle ?
Jumbo est un gamin à demi-autiste (déjà ça part mal, surtout avec sa tête à claques), qui observe les vacanciers à la jumelle, et qui bien évidemment a dû passer les 3/4 de son existence sur un divan, puisqu'il en vient à se poser des questions tout à fait classiques pour un mec de son âge :
"Quand ils pleurent, les adultes sont toujours occupés. Nous les enfants, c'est pas pareil, on pleure et c'est tout."
Plan de coupe sur ses parents dépressifs qui pleurent et qui cuisinent en même temps. Cut. Gros plan sur un enfant qui pleure et qui ne fait rien. Bon...
Ensuite on découvre Charles Berling, lui c'est un scientifique, il collectionne les moucherons, il se fait draguer par une journaliste, et point de vue familial ça va pas fort.
Ensuite on suit le parcours de sa soeur, Ginette dans un trip new age grotesque, la nature lui communique son énergie (on voit des lignes dessinées qui traversent les branches des arbres pour atteindre son coeur), elle a du mal à dormir, elle ne porte pas de montre. Et sa partie est la plus chiante et la plus longue. (Normal c'est la soeur de la réalisatrice).
L'ensemble tourne plus ou moins (plutôt moins que plus d'ailleurs) autour de la mort (un petit côté Greenaway d'ailleurs, avec un parallèle sur la nature et les insectes), et tous les personnages sont durablement marqués, voire prostrés, voire assommés, voire assommants.
Sinon il y a un château de sable qui est détruit chaque nuit par la mer, et reconstruit chaque matin par Robert le frère de Berling avec délicatesse et précision.
Bon...
On ne nous épargnera aucun des poncifs propres au cinéma d'auteur français : le cancer, la mort, le souvenir, la mélancolie, les symboles, la condition de l'artiste, la création, le néant, l'amour, le mystère, l'énigme... Mais que cache-t-elle cette énigme ?? Ahah... Surprise... Tout est dans la subjectivité des personnages...
Elle-même qui peut donner lieu à tant d'analyses masturbatoires d'exégètes complètement mabouls :
Tiens d'ailleurs, voici un extrait de la critique de Télérama qui est une blague insensée :
"(Pascale Ferran) est une scénariste discrète qui montre les gestes de ses personnages, qui montre même ce qui se passe dans leur tête, mais sans jamais rien nous expliquer et, a fortiori, sans jamais porter le moindre jugement. C'est aussi une réalisatrice respectueuse qui, durant tout le film, traque, cerne, apprivoise le mystère mais ne le perce jamais. Car elle sait bien qu'à l'instant même où elle le percerait, ce mystère, la vie s'échapperait. Et les personnages ne seraient plus que des masques sans vie, des écorces vides, des images mortes... "
Ah... Les joies du cinéma français...