Après une plongée dans une cage d'escalier ombrée, Phantom Boy s'ouvre sur l'évocation sans fard de la maladie. Mais, là où le film semble annoncer avec ses gros sabots un lourd didactisme ou encore un pathos de tous les instants, il sort tout à coup de son corps, comme son petit héros. Car Phantom Boy braconne avec délice sur bien d'autres territoires qui se rejoignent dans une esthétique tout aussi enfantine qu'agréablement rétro. Le graphisme est dépouillé mais charmant, où la simplicité n'est que de façade, tout comme son scénario, dans lequel les quatre murs de la chambre d'hôpital sont comme transcendés.
Car bien que coincé, Léo a néanmoins la possibilité de voyager. Il s'envole dans la nuit, à travers un New York fantasmé. Il dérive dans le silence de sa faiblesse et observe. Sa capacité à se projeter ne sera pas expliquée. Pas besoin. Son alliance avec un policier, lui aussi hospitalisé, le lance dans une enquête à la poursuite d'un homme mystérieux au visage cassé, aux allures d'un cubiste Picasso. A l'image de cet ennemi, les références sont multiples entre les projections astrales, une adaptation simple de Ghost et des accents de polar vécu à hauteur d'enfant, tout droit sorti de la littérature qui a pu bercer nos jeunes années.
Ses capacités sont autant symboles d'évasion, d'ailleurs, des rêves que l'on caresse quand on grandit, autant que de la sensibilité et de la capacité à comprendre de Léo qui, dans plusieurs scènes touchantes où il est intangible, sera confronté à l'inquiétude de ses parents ou de sa petite soeur. L'émotion est ici traitée de manière délicate, sans jamais l'appuyer ou la faire dériver vers le larmoyant. Car si Léo est parfois montré malade et faible, Phantom Boy s'appuie avec une égale importance sur son enquête et les aventures rocambolesques dont son petit gars en sursis est l'acteur. Occasion de le mettre en scène simplement comme un héros, dénué de l'épithète que l'on utilise à toutes les sauces de nos jours. Car Léo, malgré son enfermement, dépasse sa condition, prête main forte et sauve ses amis qui enquêtent avec lui sur ce mystérieux criminel à la gueule cassée.
Le fantastique est de presque tous les plans mais semble parfois passer inaperçu, comme si les traits simples de la direction artistique l'avaient dilué. Parce ce que Phantom Boy ressemble à l'une de ces histoires que les enfants imaginent, ou qu'ils lisent avant de s'endormir, comme Léo, le livre sur les genoux, raconte une histoire de gentils et de méchants à sa petite soeur.
Véritable fenêtre sur l'imaginaire, Phantom Boy désarme par sa simplicité et son charme issus comme d'un autre temps, tout en jouant avec bonheur sur ses influences et sur quelques touches d'un humour constamment juste. Une délicatesse rare que peu de productions actuelles peuvent se vanter d'afficher.
Une occasion supplémentaire de croire en la singularité de l'animation tricolore.
Behind_the_Mask, qui s'envole vers d'autres cieux.