Inclassable et ne ressemblant qu'à lui-même, « Plus fort que le diable » ressemble presque à un grand trip entre potes, sauf que les potes en question s'appellent John Huston et Truman Capote. Il y a bien une intrigue, mais elle est difficile à raconter. Il y a beaucoup de rebondissements, mais là encore en parler ne serait-ce qu'un peu vous gâcherait la surprise. Cela n'en est pas moins une œuvre totalement « hustonienne », où l'on retrouve aussi bien les thématiques chères au réalisateur que ses héros désabusés. Ces derniers ont beau être passionnants, grâce notamment à des dialogues souvent réjouissants, ils reflètent fort bien la conception très pessimiste qu'à Huston de l'humanité. En gros, les hommes sont des lâches ou des imbéciles et les femmes des nymphomanes (remarquez, quand elles sont interprétées par les somptueuses Jennifer Jones et Gina Lollobrigida, on ne va pas s'en plaindre!), tous obnubilés par l'argent et le pouvoir. Autant dire que tout le monde en prend pour son grade, sans pour autant que le réalisateur du « Faucon maltais » perde un instant son sens remarquable du rythme et son humour ravageur, nous offrant ainsi un film hybride souvent imprévisible, où même Humphrey Bogart s'amuse à parodier son image. On en oublierait presque le budget limité (mais bien exploité) pour nous concentrer uniquement sur l'intelligence et le cynisme de l'entreprise, perle méconnue ne demandant qu'à ne plus l'être. Un régal.