(cette critique est susceptible de contenir des spoilers)
Friedkin a déclaré : "ce film parle d'un monde de contrefaçons".
Dès le début du film, un policier que l'on perçoit intègre se fait tuer. Cela nous interpelle. Le réalisateur appréhende ce personnage avec une certaine fausseté, bardé de clichés : il lui reste 3 jours avant la retraite, une canne à pêche comme cadeau de départ. Il nous apparaît comme une caricature pleinement assumée par Friedkin. Puis nous découvrons Los Angeles qui nous est décrit comme une carte postale très vénéneuse. Tout le clinquant autour de cette ville crée une ambiance malsaine. La vision du réalisateur de Los Angeles est comme "un immense terrain vague gangrené par la violence et le cynisme sous un soleil brûlant". Cette vision est appuyée par une musique aliénante et dérangeante. C'est une Amérique hypertrophiée par le crime et la violence. La duplicité de l'environnement se reflète dans les personnages qui ne sont pas ce qu'ils paraissent. Les relations entre eux, sentimentales ou professionnelles nous mettent très mal à l'aise face à leur froideur et leur unique souci de satisfaire leur propre intérêt. On ne ressent aucune empathie ni pour les policiers, ni pour les criminels. La frontière fragile entre la police et les criminels est souvent franchie. Il y a cependant un basculement de la morale au cours du film. Le spectateur va petit à petit se désolidariser de la figure pseudo héroïque du policier pour mieux appréhender le point de vue et la motivation du criminel. C'est peut-être l'un des seuls personnages qui est conscient de la fausseté des choses, de leur absence de valeur. C'est le protagoniste qui semble le plus connecté à une certaine réalité. Il y a un effet miroir dans le film. A plusieurs reprises, on le découvre brûlant ses oeuvres : peintures, billets, et lui-même finira brûler avec sa propre création. Ce qui place l'humain au même niveau de superficialité que la contrefaçon, le faux. Friedkin nous offre aussi, une course poursuite impressionnante et pour lui c'est la forme cinématographique la plus pure : absence de dialogue, utilisation d'un langage purement cinématographique et dans ce film, comme dans la plupart des films américains, les personnages "sont ce qu'ils font".