A sa sortie on en a fait des caisses à base de "film coup de poing", "le chef d'oeuvre du cinéma français" et mes couilles dans le potage.


14 ans plus tard, qui parle encore de ce film ? Complètement disparu et zappé. Le temps a révélé son statut d'oeuvre totalement lambda et anecdotique.


A l'époque je ne voulais pas le voir, car je savais à quoi m'attendre, une sorte de resucée de Kechiche (que je trouve impitoyablement mauvais), à la sauce Bercot dont le mantra a toujours été de vouloir faire plus réel que la réalité, pour aboutir à un truc informe et inepte.


Ca ne fonctionne jamais. Parce que tout est factice là-dedans. Sans même rentrer dans le détail de ce qui est réaliste ou non (je le ferai quand même histoire de parler un peu de ce que je perçois du fonctionnement d'un commissariat), rien n'est vraisemblable dans cette succession ininterrompue de scènes où les personnages beuglent tous de manière plus hystérique les uns que les autres.


On veut faire du coup de force permanent, en plein dans la dictature de l'intensité qui m'horrpile, "mettez de l'énergie, mettez de la passion" semble constamment hurler la réalisatrice à son équipe, pour déboucher sur les sempiternelles scènes d'engueulade pas crédibles pour un sous, la plupart du temps hyper embarrassantes (au secours Karine Viard) - On retrouve la même nullité chez Kechiche d'ailleurs. Qui a déjà vécu comme ça ?


C'est globalement terriblement mal écrit, les personnages n'existent pas et tout confine au grotesque (le traitement du personnage de Marina Fois est un modèle de connerie, avec ce finish hallucinant de laideur sur la forme - au secours les vfx - de bêtise sur le fond avec un montage alterné ultime hyper kitsch).


Maiwenn se donne un rôle complètement osef, où elle sert la soupe à Joey Starr pour lui donner le beau rôle et lui rouler des patins, sans que ça n'apporte strictement rien à la représentation qu'elle souhaite faire du milieu policier.


En fait c'est un peu la police vue par les gros bobos parisiens richards déconnectés de tout, ça n'a jamais le moindre sens, entre deux séquences d'auditions de pedobear, on va discuter au boulot de machine qui est amoureuse de jean-luc qui en a marre de régis robert. Qui s'en fout ?


Dans la vraie vie c'est pas comme ça :


- D'abord globalement les policiers passent un temps infini à faire de l'administratif et de la paperasse. Ils sont pas à 12 dans des bureaux à écouter les auditions (surtout filmées) des uns ou des autres et à sourire de manière benête.


- Dans aucun monde, une dame sdf qui veut refourguer son gosse à la police, ne pourra accéder aux bureaux des policiers, elle sera recalée directement à l'accueil, où on lui expliquera d'aller se faire foutre (on y recale bien pire, et on empêche constamment les gens de déposer plainte, même pour les trucs les plus hardcore possibles).


- Quand ils auditionnent un type qui commence à lâcher des aveux (même pédo), en aucune circonstance les flics se mettront à lui hurler dessus (et encore moins à le frapper), parce que précisément, c'est l'aveu le plus entier, le plus absolu qu'ils recherchent - ils feront tout pour qu'il puisse s'exprimer sans la moindre entrave. Et surtout, avant toute chose, pouvoir le retranscrire le plus fidèlement à l'écrit et ne pas en louper une miette.


Alors bien sûr des flics peuvent hurler sur les gardés à vue (voire même être terriblement menaçants), mais c'est systématiquement quand les gardés à vue ne reconnaissent pas les faits, soit en racontant des absurdités, soit en gardant le silence. Jamais quand ils se mettent à table, puisque c'est l'objectif des policiers. Ce serait juster marquer contre son camp.

Je me rappelle d'un flic qui me semblait sous produit, qui faisait ressentir une énorme tension dans la pièce (on avait l'impression qu'il allait détruire son clavier à la manière dont il tapait dessus) qui pétait un câble car mon client gardait le silence (son droit le plus fondamental hein).

"OK TU VAS GARDER LE SILENCE ? ALORS TU VAS BIEN LE GARDER LE SILENCE ! MAIS JE VAIS QUAND MÊME TE POSER LES QUESTIONS, ET QUAND JE VAIS TE POSER LES QUESTIONS TU VAS REPONDRE BIEN DISTINCTEMENT "JE GARDE LE SILENCE", ET TU LE DIRAS POUR CHACUNE DES QUESTIONS QUE JE TE POSERAI, TU ME FERAS PAS "hmpf" "Moui" NON TU VAS DIRE BIEN DISTINCTEMENT "JE GARDE LE SILENCE" HEIN T'AS COMPRIS HEIN ??????!!!!"


Il a fini par se mettre debout limite tête contre tête, en lui hurlant en boucle des "ferme ta gueule" sous mes yeux. J'ai osé intervenir en disant "j'espère que vos propos seront aussi retranscrits dans le pv" (ils ne l'ont pas été), il se tourne vers moi "VOUS AUSSI VOUS LA FERMEZ".


J'étais mdr. (Du coup j'ai rédigé des observations annexées à la procédure - il les a lues à voix haute le con, comme si ça aurait eu un quelconque effet sur moi).


- L'ambiance dans un commissariat est globalement assez morne, les bâtiments sont délabrés (aucune représentation des geôles immondes où sont détenus les gardés à vue, le siège des punaises de lit, de la gale et autres joyeusetés). Il n'est pas rare que ça y sente la pisse.


Les flics ne s'amusent pas à se regrouper à plus de 2 ou 3 dans un bureau, tout le monde est hyper affairé derrière son pc, et au téléphone pour prendre les consignes du procureur et débriefer.


Les services des mineurs sont encore plus isolés, la règle c'est la confidentialité, le secret pour mettre à l'aise les personnes interrogées.


D'ailleurs, dans le film comme dans beaucoup de séries, on passe beaucoup de temps à interroger des gens dans le vide ce qui me paraît complètement inconcevable. Les policiers n'ont pas le temps de taper la discute pour rien avec les témoins ou les gardés à vue. Ils doivent avancer dans leurs enquêtes, et donc chaque audition doit être utile et directement exploitables pour la procédure. Quasi systématiquement ils prendront en note sur un procès verbal dédié tout ce qu'on leur dira.


Les policiers sont en réalité des scribes (parfois très mauvais d'ailleurs).


Si on arrivait à s'extirper du vernis bobo qui ringardise tout avec ses thématiques éclatées au sol, y aurait plein de choses intéressantes à représenter dans ce milieu.


Comment fonctionnent les hiérarchies, les services (c'est finalement très libre et très variable), comment se gère la pression, la répartition des tâches dans les équipes (les rôles des uns et des autres), la paperasse, les contraintes administratives assez énormes (et que nous avocats faisons également peser, mais notre présence permet aussi de solidifier les procédures, de les légitimer, impossible de remettre en cause une garde à vue et de revenir sur ses propos alors qu'on a signé son pv en présence de son avocat par exemple), les erreurs inévitables (leurs sanctions ?), les prises de décision, l'organisation des enquêtes. Ca semble moins sexy en apparence, mais c'est en réalité tellement plus passionnant.


Tout ça c'est passé à la trappe pour nous faire du sentimentalisme de merde.


Et Joey Starr est une bouse sans nom. Ils ont voulu en faire un acteur vedette des bobos, avec son regard de veau mort et sa connerie insondable. Lui aussi il est définitivement passé à la trappe. Pas une perte.

KingRabbit
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le 12 avr. 2025

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