Ce film commence, dans son générique, comme un souffle d'espoir ou tout du moins une ritournelle joyeuse sur l'enfance, celle qui est partout dans la rue, qu'il faut protéger. On s'en rend compte très vite avec les premiers plans, ceux d'une petite fille qui raconte les attouchements (véritables?) que lui auraient faits son papa.
Bref, très vite on s'engage entre légèreté de l'enfance et confrontations aux scènes particulières et prises sur le vif d'incestes, viols et autres atrocités auxquelles sont confrontés les policiers de la BPM. Eux aussi, on le verra, ont bien du mal à gérer leurs propres vies à cause d'un métier qui les envahis dans tous les instants de leur vie. Quitter les locaux de la BPM et rentrer chez eux ne signifie pas oublier toute la crudité de ce qu'ils ont vus et entendus.
Et c'est ce que la caméra de Maiwenn, qui maîtrise parfaitement son sujet, capte le mieux. Les histoires sont prenantes, les acteurs à fond dans leurs rôles parfois même un peu trop. En effet, ce qu'on se demande le plus souvent en regardant ce film, où se croisent Joey Starr (qui se débrouille pas mal en flic sensible mais à fleur de peau et surtout amoureux), Karin Viard, Nicolas Duvauchelle, Audrey Lamy, Marina Fois, c'est pourquoi passer par la fiction ? (et cette question énerve Maïwenn, elle le dit dans "Le Grand Entretien" sur France Inter)
Maiwenn, elle-même, joue dans son propre film, elle assume cette position, ce besoin constant d'être dans ses réalisations comme pour se livrer toujours plus (elle dit elle-même que ce film est bien plus personnel qu'on ne veut bien l'entendre). On peut penser que son histoire d'amour décrédibilise un peu le propos mais elle se moque de son image (quand elle retire ses fausses lunettes dans la discothèque) et fait de cette histoire un à côté du drame, comme elle a voulu capter plus que des policiers, des sentiments...
Mais, il y a quand même des instants de poésie, des scènes maîtrisées et surtout des rires francs : la scène du portable en est l'illustration. Une scène hilarante qui, tout en faisant rire, laisse un arrière-gout d'une réalité révoltante face à une génération prête à tout pour pas grand-chose "c'est quand même un beau portable". La réussite de ce film est de nous faire passer, par un montage ultra efficace (qui mérite sa récompense aux Césars) qui fait de l'enchaînement des scènes une évidence : du banal du quotidien, au rire en passant par le drame : un montage parfait, nerveux mais fluide bref une évidence et une maîtrise du découpage. La confrontation est toujours le moteur qui fait marcher la machine Maïwenn (Karin Viard et Marina Foïs en sont le paroxysme, toutes deux géniales) et la scène la plus forte du film reste celle de la confrontation entre la jeune policière musulmane et un père de famille qui tente de marier sa fille de force, dans l'énervement, elle reprend sa langue maternelle et son cri semble celui de toutes les femmes réunies, ça fait du bien !
Il faut le dire, ce film montre l'humain au plus près, à coup d'hyperréalisme, il réussit à pointer le plus précisément possible son sujet.
Ainsi, que l'on tombe ou que l'on décolle, on ne sort pas indemne du film de Maiwenn qui sait aller au cœur de son sujet et nous y plonger tout entier malgré ses défauts. Sa fin nous laisse encore un moment suspendus aux images du film tout comme ces êtres, auxquels le film nous confronte, sont suspendus à la vie...
(critique retravaillée après la rencontre avec la réalisatrice le 26/10/12)