A une ou deux exceptions près, tous les films d’Hayao Miyazaki mettent en scène des objets volants. Porco Rosso n’échappe pas à la règle avec ses hydravions. Porco Rosso, Marco son ancien nom, est un chasseur de primes italien à tête de cochon durant la période d’entre-deux-guerres. Sa tête de cochon, fruit d’une malédiction, est le seul élément qui contraste avec la réalité dans laquelle le film est ancré. Coupé du reste du monde dans une petite crique paradisiaque de l’Adriatique, Marco ne se déplace qu’avec son flambant hydravion rouge qu’il pilote avec habileté. Lorsque sa vie solitaire ne lui convient plus, il se rend à l’hôtel Adriano où il retrouve une vieille connaissance, Gina, la patronne de l’hôtel. Les pirates de l’air, fatigués de prendre des déculottés face à ce fier cochon, engage un as américain de l’aviation, Curtis. Le duel aérien entre ces deux hommes, que tout oppose excepté la passion du vol, clôturera en apothéose ce film de Miyazaki.
Le film est aussi une touchante histoire de rescapé. Aviateur durant la première guerre mondiale, notre héros fût l’un des seuls à la terminer en vie. Les fantômes du passé ne l’ont depuis pas quitté. Porco Rosso est aussi une belle histoire d’amour refoulé entre Gina et Marco. La cause à l’honneur bien sûr, toujours l’honneur… L’honneur d’un ami, d’un camarade qui a vu tomber sous ses yeux Berlini, le mari de Gina, et qui donc se refuse à l’aimer. L’ombre de l’Italie fasciste se profile à l’horizon et l’époque des pirates qui savent faire preuve de bienséance semble se terminer. Tout ceci est empreint d’une douce mélancolie qui berce le spectateur. Un sentiment renforcé par la voix grave de Jean Reno doublant Porco Rosso.
Il y a des choses immuables dans la vie. La qualité du dessin d’un film d’animation des studios Ghibli en fait partie. Les balais aériens, les paysages méditerranéens et l’expression des personnages donnent au travail de Miyazaki et son équipe ses lettres de noblesse.
Un détail important est la chanson écoutée par Marco sur sa plage ou chantée par Gina à l’hôtel. Cette chanson, Le Temps des cerises, est associée à un chant communard et qui est empreint de nostalgie et de regrets d’un combat qui échoue ou d’un amour perdu. Bref, une musique qui colle parfaitement avec le film.
Pour la petite histoire, Miyazaki s’est inspiré de l’écrivain Roald Dahl pour sa fabuleuse scène des fantômes des aviateurs et de leur avion se confondant en un nuage. Ancien aviateur de la Royal Air Force, Roald Dahl avait décrit cette scène dans sa nouvelle Ils ne Feront pas de Vieux Os.