Porco Rosso
7.7
Porco Rosso

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (1992)

Une tache rouge sang.
Comme une brûlure en plein ciel, une déchirure dans le bleu paisible qui surplombe l'Adriatique, cette petite tache attire l'oeil. Elle vole, elle virevolte, danse autour des nuages, elle crée la peur sans cracher la mort, jusqu'à retrouver la quiétude de son île déserte, de son bout de paradis arraché aux eaux calmes.
Elle est guidée par un pilote maudit, un cochon solitaire qui la fait tournoyer inlassablement, chasseur de primes sans attaches, perdu dans la liberté des grands espaces qui s'offrent à lui.


Son seul point d'ancrage est un hôtel campé sur une île, cernée entre l'azur du ciel et celui de la mer. Rengaine inlassable, la lune le voit débarquer chaque soir au pied de l'Adriano pour y boire un verre, manger un morceau, écouter Gina chanter Le temps des cerises. Gina, dernier lien vers un passé d'homme, vers des amis partis dans un ruban d'avions en plein ciel.


Dans un monde qui ne cherche qu'à le détruire, entre pirates attachants, américains exubérants ou pilotes fascistes, dans cet univers qui le rejette, Porco s'envole, libre, seul. Imprévisible, il épouse la force de l'océan, l'éternité de sa puissance paisible.
Gina, elle, l'attend clouée au sol. Dans le jardin de l'Adriano, elle attend une visite, un signe, un choix. Elle voit, chaque après-midi, cette tache rouge qui la contourne dans le ciel.


Mais qu'importe, le ciel l'appelle. Seul face au monde, héros romantique, insensible. Porco appartient aux cieux, aux doux alizés des contours de l'Italie, il n'est plus un homme, il n'est plus comme eux. Il vole.
Dans un ciel qui a oublié de s'éteindre, la lumière accompagne toujours son hydravion flamboyant. Agile, gracieux, il se faufile entre les ennemis, hors d'atteinte de tous, il plane au fil du vent, flâne le long de côtes enchanteresses. Magnétique, charismatique, perdu dans le souvenir d'une mer de nuages éblouissante, il échoue, lutte, fait parler la poudre et les poings. Il vibre d'une humanité envahissante, lui le porc obscène.


Dans sa solitude, adossée au piano du bar, Gina vit dans l'attente. Elle chante, boit, vit, mais chaque jour, elle lève les yeux vers le ciel, un peu en-dessous du soleil, pour voir le passé se refléter dans la limpidité des cieux, un océan vu d'en bas.
Et toujours, cette tache rouge qui danse autour de l'Adriano.
Une valse à mille temps.

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le 12 juil. 2015

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