Un vieux cochon m'a appris que si l'on vole assez haut, le ciel se transforme en eau, les nuages en écume, et on finit sur la mer. Ça laisse peu de place aux étoiles. Il y a bien les amerloques pour en créer des artificielles, avec leurs films et leurs stars, mais ça a fini par les aveugler de cette voie lactée au-dessus de nos têtes. Plutôt jolie d'ailleurs, vue de loin. La légende dit qu'elle est faite des rêveurs qui, à force de côtoyer les cieux, ont fini par les rejoindre définitivement.
Quand Porco m'accepte sur son île déserte et qu'il me raconte cette histoire, le trémolo dans sa voix trahit ce qu'il dissimule derrière ses lunettes noires. Je crois qu'il a une femme dans la tête, et une malédiction qui l'empêche de lui rendre visite. Pourtant on croirait pas, comme ça, qu'il puisse en aimer une, de femme. Toujours à dire qu'elles sont trop fragiles pour ce monde.
Il dit aussi qu'une belle femme, ça transforme un homme en porc. De ce que j'ai vu, ça transforme surtout les loups en agneaux.
On ne sait jamais très bien ce qu'il pense, Porco. Peut-être qu'un jour, il m'expliquera pourquoi il n'a pas rejoint les rêveurs. Tant qu'il reste sur la mer, je ne m'en fais pas trop. Et puis comme je ne le vois quasiment jamais, je peux bien l'y mettre moi-même, dans cette voie lactée. Jusqu'à notre prochaine rencontre, tout du moins.