Possession
7.2
Possession

Film de Andrzej Zulawski (1981)

Non, Possession n'est pas un film agréable à visionner. Il est même parfois gênant ; on a envie de détourner les yeux, d'arrêter de regarder ces acteurs visiblement poussés à bout. Mais la fascination (le voyeurisme ?) reste plus forte, et le "charme" de l’œuvre opère malgré tout. Comme dans un bon David Lynch, pas grave si on ne saisit pas tout, l'essentiel reste de se laisser porter ; le film est fait pour hanter, on aura donc tout le temps d'y réfléchir une fois le générique de fin déroulé.


Force est de constater que le travail de la caméra est incroyable, témoin d'une maîtrise exceptionnelle de l'outil, et fruit d'une minutieuse réflexion sur ses possibilités techniques et sur la relation entre le filmant et le filmé. Tout porte le spectateur vers le déséquilibre : les mouvement amples et que l'on croirait infinis de la caméra, dont les travellings continuent parfois jusqu'au hors-cadre ; les acteurs sans cesse en mouvement ; le scénario qui évolue en circonvolutions vers les plus extrêmes résolutions...


Comme rythmé par un pendule démoniaque, tout est en proie à un mouvement obsessionnel, douloureux mais exutoire : Sam Neill sur sa chaise à bascule, Adjani et ses crises d'hystérie, les situations qui reviennent, toujours les mêmes, mais toujours plus intenses, comme les disputes du couple. Même les oppressants décors, dont l'aspect anguleux et dépourvu de vie est esthétisé à l'extrême, semblent s'aligner sur les protagonistes, à la fois moteurs et victimes du mouvement.


Emporté dans ce mouvement de balançoire, il est difficile pour le spectateur de se situer, d'évaluer posément la situation, d'analyser. Et c'est le tour de force de Zulawski que de nous mettre dans la même situation de douloureuse incompréhension que ses protagonistes.


Quelques scènes horriblement malsaines émaillent le film et mettent en lumière une imagerie originale et profondément dérangeante, et de surcroît mise en valeur par une mise en scène parfaitement accomplie.


Oui le film peut parfois prêter à sourire, comme une performance d'art contemporain un peu ratée. Mais le film balaye les préjugés par son talent, et l'authentique douleur qui suinte de toutes ses pores. Tour de force filmique, testament d'un amour sincère mais vicié, Possession peut agacer, ennuyer, dégoûter, mais sûrement pas indifférer.

Seet
8
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le 20 juin 2016

Critique lue 313 fois

Seet

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