Le corps en charpie
Le nom est sans doute lourd à porter, mais le jeune réalisateur arrive à s’en détacher pour faire de son film, une oeuvre tenace qui n’a pas froid aux yeux. Après Antiviral qui nous proposait une...
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le 15 avr. 2021
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Possessor est le nouveau film de Brandon Cronenberg, huit ans après son premier long Antiviral, qui avait pas mal fait parler de lui à l’époque de sa sélection à la compétition cannoise Un certain regard.
Pour commencer, une chose est sûre : Brandon est bien le fils de son père. Tout au long du film, la filiation est évidente, que ce soit dans la recherche esthétique tout comme dans l’exploration de certaines thématiques.
Et cela va bien au-delà du rapprochement évident entre Possessor et le génialissime Existenz de papa Cronenberg (même façon de connecter les corps à une nouvelle réalité, d’incarner des personnages et de plonger dans un « jeu »). Rappelons d’ailleurs que Brandon s’est occupé des effets spéciaux sur le film de son père en 1999. Coïncidence, sûrement pas.
Possessor fait actuellement le tour des festivals, en particulier ceux spécialisés dans le genre. Après être passé par la compétition à Sundance, le film a reçu le Grand Prix du prestigieux festival de Gérardmer, et fait également partie de la sélection du BIFF qui se tient actuellement.
Ce qui m’a tout d’abord surpris, c’est que film est difficile à appréhender. Il repose principalement sur un concept, décrit d’entrée de jeu avec le synopsis : nous voici plongés dans un monde où il est possible de se connecter à un autre corps et d’en prendre le contrôle. Cette technologie est utilisée par une firme secrète très puissante et riche, pour assassiner sur commande des hommes d’affaires influents en se faisant passer pour un proche et éviter tout soupçon. Mais voici que notre héroïne, incarnée par l’actrice Andrea Riseborough – aperçue dans des seconds rôles de films comme Birdman, Nocturnal Animals ou La mort de Staline – se retrouve bloquée dans son corps d’emprunt, après un meurtre.
Finalement, ce n’est pas tant l’actrice Andrea Riseborough que l’on suivra au long du film, mais plutôt le personnage joué par Christopher Abbott, l’individu qu’elle habite, "l'hôte".
Passé la présentation du concept de base (une magnifique première scène d’assassinat), l’intrigue devient assez floue, secondaire, presque accessoire. Côté scénario, le film s'embourbe. L'histoire n’est pour moi pas aboutie et j’ai trouvé ça vraiment dommage qu'un si bon concept soit si mal exploité.
Et en même temps, on sent bien que là n’est pas l’intérêt du film. Possessor est davantage un essai cinématographique, une expérience sensorielle où le réalisateur prend un malin plaisir à tester des choses, à s’amuser d’effets visuels. Du point de vue formel, le film est un vrai bijou : la conception de chaque plan a été mûrement réfléchie, et il y a un vrai travail sur les couleurs et les textures, notamment lorsque le rêve semble se mêler à la réalité.
Force est de constater que Brandon Cronenberg s’émerveille comme un enfant qui découvrirait le cinéma, ou comme un étudiant de cinéma qui essayerait le champs des possibles grâce à l’utilisation des images.
Malgré son côté très expérimental et son rapport assez organique aux images, j’ai eu du mal à me laisser entraîner (posséder ?) par ce Possessor. D’un point de vue narratif, le film n’est qu’une esquisse, un « ça aurait pu être… ».
Un exercice de style en somme, formellement pas déplaisant à regarder, mais scénaristiquement un peu vain. En tout cas j’ai hâte de voir ce que Brandon Cronenberg nous proposera quand il s’associera à un scénariste !
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Créée
le 12 avr. 2021
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