La véritable révélation de Julia Roberts date officiellement de 1990, mais je retiendrai ce film comme déclencheur de son succès. C'est la première fois qu'on lui donne un rôle d'avant-plan (plus proche du titre de « personnage principal » au singulier qu'au pluriel), qu'on lui fait confiance et qu'elle se fait confiance. Elle sort du moule qu'on lui imposait jusqu'ici, et toute seule encore. Potins de femmes est aussi daté qu'il est mal titré en français, mais on aura autant de plaisir à plonger dans l'époque et dans ce fabuleux accent louisianais que dans une ambiance à la Burton – sans le malaise –, car les couleurs et la joie qui règnent y ressemblent – sans le malaise ni d'innocence.
Le film pourrait être résumé en tant que deux choses importantes : une étude de la gentillesse et une quête de la sagesse du commérage. Car au moins cet horrible titre français a-t-il l'avantage d'être juste ; les potins sont là, mais pas pour donner la satisfaction crue de reproduire des ragots au cinéma. Les personnages sont bien construits, pas unilatéraux puisqu'ils sont à la recherche de la culture et de la pertinence, et le scénario est suffisamment intelligent pour insérer des insinuations quant à l'innocente risibilité de la chose. Il arrive à maintenir un équilibre rare, celui qui s'établit entre le comique de situation quatiment sitcomien et son écriture mûre et posée.
C'est une adaptation d'une pièce de théâtre, et ç'aurait pu rendre le film plus vulnérable encore à la cheapiness des sitcoms, mais non ! Tout bouge dans Steel Magnolias (le titre en VO est quand même beaucoup plus classe), les accessoires remplissent l'image, l'arrière-plan bouge parfois même quand on ne le voit pas encore, c'est dire à quel point l'image est remplie. Les longs dialogues sont dirigés à la seconde (et apparemment à la baguette par le réalisateur) et fonctionnent à merveille. Bon, certes, les émotions sont parfois un peu trop vives, tout est trop rose, et tout passe un peu trop vite... C'est en partie pour préparer une partie finale choquante de contraste, mais cette dernière souffre malheureusement un peu aussi de ce trop-plein de vitalité. Mais c'est typiquement l'exemple d'un bon film feelgood dont les tares sont sous contrôle.
Quantième Art