Colle toi ça au cul et ramone !
2ème film de John McTiernan et déjà le meilleur film d'action du monde.
La mise en scène de McTiernan est incroyable et contribue grandement à l'immersion du spectateur. Ses mouvements de caméras sont amples, ses cadres ne laissent rien au hasard. Tout ce qui est montré à l'image à un sens, une fonction bien précise dans le déroulement du récit ou tout simplement dans la compréhension de celui-ci et de l'action qui le compose.
Tourner un film dans un décor naturel, hostile et luxuriant tel qu'une jungle et aboutir à un tel degré de précision dans la mise en scène relève tout simplement du génie.
Et puis PREDATOR n'est pas un film d'action décérébré, un nanar de SF dispensable comme le criaient bien fort nos critiques de l'époque. PREDATOR est tout autre. C'est une aventure humaine qui emprunte au western des années 50 (The Garden of Evil d'Henry Hathaway semble avoir beaucoup inspiré McT) à la Science-Fiction et à l'horreur et qui nous délivre un récit d'une profondeur insoupçonnée pour qui veut bien prendre la peine le voir entre les images.
Au beau milieu des tueries, des bons mots et des montagnes de muscles, PREDATOR est l'histoire d'un groupe d'hommes dont la virilité et la puissance sera remise en cause par un ennemi encore plus puissant et indestructible qu'eux. Le film se divise donc en 3 parties qui se suivent avec une logique implacable.
La 1ère partie est un étalage de testostérone à l'état brut. La présentation de l'équipe de mercenaires bodybuildés, indestructibles, grossiers avec des flingues énormes et une assurance à toute épreuve. Ces surhommes vont attaquer et détruire à eux 7 tout un camp de rebelles planqué s dans la jungle. Ils sont forts. Très forts. Mais cet étalage de puissance et la supériorité qui en découle vont être mis à rude épreuve quand un ennemi invisible commencera à les traquer et les exterminer 1 par 1. Ici, toutes les scènes d'action, aussi bourrines et jouissives soient-elles, sont nécessaires à la suite du récit. Elles servent à montrer l'assurance et la supériorité de l'équipe pour mieux la faire voler en éclat et par conséquent, détruire l'image des héros.
D'ailleurs, il est intéressant de constater que dans le cinéma d'action de McTiernan, le personnage principal est souvent un homme ordinaire qui devient un héros par les évènements qu'il va subir. A propos de son refus de faire une suite à Die Hard (c'est Reny Harlin qui s'y est collé), McTiernan expliquait qu'il n'éprouvait aucun plaisir à raconter une histoire dans lequel le personnage principal avait déjà le statut de héros (Dans Die Hard 2, McClane est connu de tout le monde comme le héros qui a sauvé les otages du Nakatomi Plaza). Ce qui intéresse McT c'est de raconter le parcours qui fait qu'un mec Lambda devienne un héros. C'est pour cette raison qu'il accepta de réaliser Die Hard With a Vengeance, parce qu'au début du récit, John McClane n'est plus le héros du Nakatomi Plaz ou de l'Aéroport mais simplement un chômeur ivrogne divorcé au bout du rouleau. Un moins que rien qui va, par la force des choses (Simon), devenir un héros. Ce genre de personnage offre des possibilités de développement inouï.
Dans PREDATOR, comme les mercenaires sont déjà des surhommes leur parcours était terminé. Il fallait donc que McT les fasse redevenir des hommes ordinaires. Pour ce faire, il va les confronter à un chasseur Extra Terrestre et transformer ces héros en proies.
C'est la 2ème partie du film, celle de la remise en question, du doute et de la naissance de la peur. Dans cette 2ème partie, les surhommes apprennent que, pour la première fois, leurs armes ne peuvent pas tuer aussi facilement que leur puissance le laisser présager. Ils sont confrontés à plus fort qu'eux, à plus évolué technologiquement. Ils ont peur et d'autant plus peur qu'ils ne savent pas à qui ils ont à faire. C'est dans cette deuxième partie également que McT amène un personnage féminin (la prisonnière rebelle), le seul du film. Ce personnage à une importance capitale dans le changement mental qui s'opère sur les mercenaires. La femme, le sexe faible, a des connaissances que le mâle supérieur n'a pas. Elle sait qui est cet ennemi, ce Diable qui vient décimer les villages quand il fait chaud. Elle apprendra plus tard que ce monstre peut saigner et donc qu'il est vulnérable (à la suite de cette scène mythique de déforestation qui n'a de but que de prouver l'inutilité des armes contre le PREDATOR) mais elle ne dira rien comme pour préserver sa supériorité sur le mâle dominant. L'apogée de cette 2ème partie arrivera avec la poursuite et la mort à la chaine des membres de l'équipe de Dutch. Certains n'abandonnerons pas leur armes et mourront en homme face à face avec leur démon(Billy), d'autres tenteront de lutter avec leurs armes inutiles avant de périr dans la souffrance (Dillon) et d'autres encore fuiront à toutes jambes ce chasseur invisible venu faire un safari sur Terre (Dutch).
Enfin, il y a la 3ème et dernière partie, quand Dutch se hisse sur les berges de la rivière et se retrouve seul face au PREDATOR qui ne peut pas le voir. Dès que Dutch comprend l'utilité de la boue, c'est le retour à la Terre, la bête se réveille. L'homme devient un animal pour combattre l'animal. Les armes redeviennent préhistoriques, c'est un retour aux sources, Man vs Wild dont le point culminant sera un affrontement bestial comme on en a plus vu au cinéma depuis. A la fin, même s'il sort vainqueur du combat, Dutch n'est plus et ne sera plus jamais le même. PREDATOR est quelque part un film anti militariste. Mais c'est surtout un sacré putain de bon film maitrisé de bout en bout par un réalisateur de génie qu'on ne voit pas assez souvent au cinéma !!!!