Après avoir brillamment renouvelé le genre du thriller hollywoodien avec des longs-métrages comme Prisoners et Sicario, le québécois Denis Villeneuve s'essaye pour la première fois à la science fiction, en mettant en scène une rencontre entre humains et extraterrestres dans Premier Contact, sorte de film-crash test pour son projet suivant, la suite très attendue du chef-d’œuvre de Ridley Scott, Blade Runner.


Des énigmes à résoudre, une femme esseulée face à une hiérarchie masculine violente, une mise en scène reconnaissable entre mille, à la fois sobre et élégante... Pas de doute, nous sommes bel et bien chez Denis Villeneuve, qui accomplit ici un nouveau coup de maître, s’inscrivant parfaitement dans sa cohérente et passionnante filmographie.


Plusieurs ovnis stationnent, silencieux et en lévitation, aux quatre coins du globe. provoquant la stupeur et l'interrogation. Que veulent ces extraterrestres ? Sont-ils une menace pour l'humanité ou viennent-ils en paix ? Il y a là un soupçon d'Independence Day, pourtant ce qui suit tient définitivement plus du Spielberg de Rencontres du troisième type que de la bourrinade (certes très amusante) de Roland Emmerich. Ici, tout est une question de langage, de communication entre les civilisations. Anti-spectaculaire au possible, mais non moins grandiose, Premier Contact est une méditation sur la nécessité de l'écoute, un blockbuster intimiste et réflexif qui nous confronte à notre peur de l'inconnu, tout en nous invitant à une réflexion métaphysique sur le temps, un peu à la manière d'Interstellar (en beaucoup moins péniblement théorique cela dit).


Alors évidemment, et c'est peut-être le seul reproche qu'on puisse faire à la dernière demi-heure du film, lorsque qu'on s'amuse à transcender l'espace-temps, impossible d'échapper aux pirouettes scénaristiques farfelues, aux énormes ficelles, aux Deus ex machina tirés par les cheveux... Je reste très vague à ce sujet pour ne rien dévoiler du plot twist, mais soyez rassurés, cela ne gâche pas pour autant l'intensité dramaturgique et émotionnelle du récit, essentiellement portée par le personnage de Louise, héroïne sensible et humaniste, campée par une Amy Adams plus transcendante que jamais.


Enfin, il est important de saluer l'immense prouesse esthétique réalisée par Villeneuve, qui a toujours su tirer le meilleur des chefs-opérateurs avec qui il a collaboré (André Turpin, Roger Deakins et maintenant Bradford Young). Les plans sont lents, minutieusement composés, chargés en tension et se marient parfaitement avec la musique atmosphérique de Jóhann Jóhannsson, ainsi qu'avec l'épure des décors, à l'image de cet impressionnant establishing shot survolant une vallée embrumée. Du très beau travail !


Réinventant totalement le film d'invasion extraterrestre, Premier Contact est donc une œuvre de science fiction majeure et instantanément culte, sans doute le long-métrage le plus abouti de son auteur. Pour terminer, je me permets d'ajouter que le prochain Blade Runner est assurément entre de bonnes mains.


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Amaury-F
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le 9 déc. 2016

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