Le lexique du temps
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Chers humains,
C’est avec passion et désolation que j’observe votre monde. Votre temps passe et ne change rien à votre comportement. Vous pensez détenir la connaissance. Vous croyez tout savoir de votre monde. Il n’en est rien.
Telle pourrait être la pensée de ces êtres venus d’ailleurs…
A mi-chemin entre Rencontre du troisième type et La Guerre des Mondes, Denis Villeneuve s’attaque à son premier film de science-fiction, et il est très réussi !
Réussi, car les premiers plans ne délivrent pas immédiatement l’intrigue principale. Louise Banks, linguistique émérite, doit alors faire face à un drame profond, sans doute le plus terrible qu’un humain puisse vivre.
C’est alors que douze objets volants non identifiés apparaissent aux quatre coins du monde. Le spectateur n’est amené à les découvrir que progressivement. D’abord au second plan, lorsqu’un groupe d’élèves se précipite devant un écran géant, puis via les incessantes notifications de smartphone, et par la suite furtivement au travers d’une télévision. Ce n’est que lorsque le docteur Banks est débauché par l’armée, afin d’établir un premier contact avec ces aliens, que nous pouvons visualiser pleinement ces vaisseaux imposants et à la fois somptueux.
Avec l’aide de Ian Donnelly, physicien de renom, Louise tente de communiquer avec ces inquiétants extraterrestres qui agitent les foules. Ici, le langage est au centre de l’intrigue, et cela rend le propos du film très intéressant. Comment peut-on se faire comprendre d’inconnus ? Comment être sûr que le message envoyé a bien été interprété ? Mais surtout, comment peut-on établir un contact pacifique extraterrestre, alors que les humains n’arrivent même pas à communiquer pleinement entre eux ?
Dans ce contexte, les médias relayent sans cesse les informations qui bousculent le monde, cristallisant davantage la terreur des humains de ce phénomène. Les armées de chaque pays se chargent de sécuriser les sites des ovnis et sont au premier rang de ce qu’ils considèrent, pour certains, comme une menace.
Denis Villeneuve dépeint une vision réaliste de ce qu’un évènement de cette ampleur pourrait avoir comme conséquences. L’armée est inefficace, les médias omniprésents, la société unie dans la division. Ces sujets restent en filigrane tout au long du film, et contribuent à l’ambiance paralytique.
Cette atmosphère pesante est renforcée par la réalisation calme et fluide. En termes techniques, l’utilisation du grand angle permet de ressentir la taille démesurée de cet ovni, mais aussi de capter dans son ensemble les protagonistes. De même, les nombreux plans du haut vers le bas signifient l’immensité de l’univers comparée à celle de la Terre.
En terme sonore, la bande originale de Jóhann Jóhannsson - très efficace - a des airs de celle d’Interstellar, composée par Hans Zimmer. Son lyrisme permet d’accentuer la menace inconnue et accompagne subtilement les scènes de pathos. Le mixage son permet certaines astuces pour transmettre un message, comme par exemple cette opposition entre les hélicos bruyants de l’armée et le silence abyssal des vaisseaux extraterrestres.
Il faut relever la performance exceptionnelle d’Amy Adams, qui dévoile une palette d’émotions très forte. Il n’est pas impossible que les Oscars récompensent le réalisateur ou sa comédienne fin février…
Verdict
Ce fut une expérience assez forte en ce qui me concerne, visuellement et mentalement. Les grands questionnements de notre monde, posés ici à travers le prisme de la science-fiction, m’ont amené à une réflexion plus poussée en sortant de la salle. L’intelligence du réalisateur ainsi que du scénariste a été de ne pas détériorer le matériau de base, à savoir la nouvelle dont s’inspire le film, « L’Histoire de ta vie » de Ted Chiang.
Si vous souhaitez connaître davantage les œuvres de Denis Villeneuve, plongez sans plus attendre dans le mystérieux Enemy, le sombre Prisoners mais aussi le violent Sicario.
Créée
le 17 nov. 2019
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