Le Western connait une deuxième jeunesse ces dernières années. L’assassinat de Jessie James par le lâche Robert Ford, 3h10 pour Yuma, True Grit, Django Unchained, Les Huits Salopards, The Revenant… Tous ces bons, voire très bons films, témoignent d’une volonté de renouveler le genre. Le réalisateur néerlandais Martin Koolhoven s’inscrit dans cette lignée en proposant une œuvre déroutante et violente.
Contrairement à tous les productions cités ci-dessus, Brimstone a pour originalité de mettre une femme au premier plan. C’est un parti pris audacieux et généreux, qui fait la part belle à notre époque, car elles sont souvent délaissées à des rôles secondaires, sans aucun relief. Ainsi, les cow-boys laissent place à une héroïne dont le mutisme laisse présager de profondes blessures. Celles-ci, aussi choquantes soient-elles, servent à développer la psychologie d’un personnage féminin, dans un univers gonflé à la testostérone.
Elizabeth est une jeune sage-femme muette, qui opère avec l’aide de sa fille Sam. Elle accompli le plus beau métier du monde et donne la vie, tout un symbole. Son existence se voit bouleversée par l’arrivée d’un mystérieux prêcheur. Son sermon prononcé dans l’église, promet enfer et damnation aux brebis égarées. Filmé par le bas, cette scène souligne le caractère pernicieux et diabolique de l’homme de foi. Lorsque son discours se termine, un accouchement se déclenche, mais notre protagoniste ne pourra sauver le nourrisson. Comme si, le fondamentalisme religieux, incarné par un Dieu personnifié sous les traits du prêcheur, annihilerait toute possibilité de vie. Assouvi par un esprit de vengeance, il sèmera la terreur au sein du foyer de Liz, provoquant d’atroces massacres.
Découpé en plusieurs chapitres, Brimstone surprend dans sa construction et renforce l’impact des péripéties. En effet, les actes suivants se focalisent sur le passé de Liz et dévoilent les sauvageries qu’elle a subie. Ils permettront de découvrir les liens qui l’attachent à l’infâme criminel mais aussi de soulever un autre sujet : la belle est maître de son corps et ne veut se résoudre à l’autorité masculine. Malgré la violence disséminée durant plus de deux heures, l’œuvre sous-tend un propos bien plus engagé, presque féministe, sur le traitement réservé aux femmes dans une société en mutation.
Si ces chapitres sont plutôt réussis, la dernière section se révèle assez décevante et prévisible. Elle reprend l’intrigue à la fin du premier acte, lorsque Liz fuit son foyer familial. L’animosité du bourreau est poussée à un tel extrême, qu’elle peut engendrer de l’incompréhension chez le spectateur. Quand bien même cette scène de châtiment dénonce l’intégrisme religieux, elle paraît totalement irréelle, diminuée par d’importantes incohérences scénaristiques. Il semblerait qu’elle soit à l’origine de l’interdiction aux moins de 16 ans en salles.
Brimstone est porté par Dakota Fanning, une jeune actrice de 23 ans, ayant déjà de nombreux films à son actif. Ce premier rôle lui offre la possibilité de faire passer tous ses sentiments par les traits de son visage. On ressent toute la peur qu’elle éprouve dans ses yeux bleus grands ouverts, mais aussi sa détermination à travers son regard perçant. Guy Pearce est troublant dans son rôle. Par contre, il a tendance à trop en rajouter, il semble être en roue libre dans certains passages. À noter, la drôle de présence au casting de Kit Harington et de Carice Van Houten, respectivement Jon Snow et Melisandre dans Game of Thrones.
Enfin, la réalisation très soignée apporte un rendu très coloré en fonction des saisons. Les plans d’extérieurs sont particulièrement beaux et reflètent tous les aspects du Far West. Cette traque sans merci est accompagnée par une superbe bande sonore christique de Junkie XL (Mad Max : Fury Road, Deadpool, Batman v Superman).
Verdict
Il est évident que ce thriller est inspiré de l’œuvre classique La Nuit du Chasseur. Sans en être une pâle copie, et malgré quelques faiblesses scénaristiques, Brimstone est empreint d’une noirceur absolue inédite aux films de Western.