Ayant déjà vu et apprécié le film d'Eric Lartigau à l'époque de sa sortie, j'ai un peu hésité au moment de l'emprunter à la médiathèque, de peur d'abîmer un joli souvenir.
Heureusement, j'ai fini par me laisser tenter, et je ne le regrette pas, tant j'ai passé un super moment, charmé par les facéties du couple central, très attachant, composé d'Alain Chabat et de Charlotte Gainsbourg.
En prime, je n'avais conservé que très peu de souvenirs précis, ce qui m'a offert une véritable redécouverte de "Prête moi ta main".
Avec pour seule expérience deux comédies absurdes à la gloire de Kad et Olivier, Eric Lartigau passe clairement un cap avec ce troisième long-métrage, une comédie romantique au ton très moderne mais à la structure classique, qui lorgne vers la screwball comedy américaine.
Autour d'un scénario cousu de fil blanc mais solidement charpenté, le réalisateur mise tout sur des dialogues enlevés, une poignée de gags efficaces, et surtout la très belle alchimie entre ses deux têtes d'affiche, pas forcément évidente de prime abord...
Alain Chabat a beau jouer sur du velours, dans la peau d'un type égocentrique et névrosé, mais plutôt sympathique, incapable de tenir tête à sa môman très directive (pétulante Bernadette Lafont) et à ses grandes sœurs autoritaires, sa prestation reste un modèle du genre (mimiques, phrasé, gestuelle...).
Mais c'est Charlotte Gainsbourg qui crève l'écran, dans un rôle à contre-emploi, faisant preuve d'une force comique insoupçonnée, balançant des horreurs avec conviction, tout en parvenant à apparaître charmante (on est quand même dans une rom-com).
Et pourtant, je ne fais pas partie de ses fans enamourés, mais la fille de Jane et Serge se montre ici sous son meilleur jour, bluffante dans le rôle de la jeune femme "louée" par Luis afin que le gynécée familial renonce à le harceler au sujet du mariage, et le laisse mener tranquillement sa petite existence de célibataire immature.
Certes, le film n'est pas dénué de défauts, à l'image de seconds rôles trop peu développés, ou de grosses ficelles scénaristiques parfois évitables (je ne parle même pas des procédures d'adoption, décrites avec une grossièreté qui a dû navrer les parents concernés). Mais disons que ces carences restent mineures, et s'accordent plutôt bien avec la tonalité foutraque et vaudevillesque de l'ensemble.
Au final, "Prête moi ta main" marque peut-être le véritable point de départ de la carrière d'Eric Lartigau, honnête artisan qu'on retrouvera par la suite aux commandes de plusieurs projets sympathiques, toujours dans son registre du cinéma grand public mais pas idiot, tels que "L'homme qui voulait vivre sa vie", "La famille Bélier", ou encore "Les infidèles" (pour le segment intitulé "Lolita").