C'est le troisième Carpenter que je découvre cette année. Après Ghost of Mars, qui était risible comme prévu, il rejoint le "clan" de Fog: celui des déceptions. (Avant de lire la suite, sachez que je spoile un peu la filmo de Big John).
Déjà, quand on sait que ce film fait partie la "trilogie de l'horreur" du cinéaste, en compagnie du chef-d'oeuvre The Thing, et du génial L'Antre de la folie, on a juste envie de se demander comment c'est tout simplement possible, et de se jeter par une fenêtre. Oui, je sais, on appelle ça se défenestrer, pas la peine de faire les malins. Les deux me semblent vraiment un cran au-dessus, clairement.
Et puis c’est quoi cette moyenne ? Comment ce truc peut avoir plus que Christine ? SERIEUSEMENT.
Ensuite, tout ce que je peux dire, c'est qu'effectivement le film partage beaucoup de points communs avec The Thing, comme le type des personnages (des scientifiques) + l’aspect huis clos + le virus inconnu (le liquide vert ici, le « truc » qui possède le chien dans l’intro de The Thing, si mes souvenirs sont bons) qui se propage à l'intérieur du groupe.
Comme dans The Thing, l’effet de propagation donne une allure de slasher au film, puisque les individus se retrouvent infectés les uns après les autres. Pour un peu, on penserait à Halloween. Cet élément est également valable concernant l’Antre de la folie, puisque dans ce film-là, l’écrivain contaminait ses lecteurs, et Sam Neil avait affaire aux habitants de la petite bourgade, tous contre lui.
Aussi, l’idée de lieu de passage d’un monde à l’autre (le miroir ici, concernant l’Antre de la folie, c’est un peu plus compliqué à expliquer, mais ceux qui l’ont vu me comprendront) + l’importance de la religion, et surtout du lieu de culte en lieu-même, car c’est ici que se « terre » le mal (le liquide vert dans le Prince des Ténèbres, l’écrivain dans L’antre de la folie) me rappelle L'Antre de la folie.
Dans les deux films, on remarque également une histoire d'amour impossible. Si le personnage principal du film veut s'en sortir, il le fera tout seul. Le prix à payer pour avoir défier le Mal, en quelque sorte.
Le Prince des Ténèbres fait donc partie intégrante de la trilogie, sauf que le traitement donne un contenu risible au film.
Pour preuve, j’ai vraiment l'impression que Carpenter a voulu placer un peu tout le monde dans son film: des européens, des blacks, des chinois (dont un particulièrement lourdingue, avec ses blagues qui tombent à l'eau) etc..
Pour en revenir au chinois du dessus, soulignons tout de même que lorsqu'il décide de se barricader de deux de ses « potes » infectés, il ne trouve rien d'autre à faire que sortir des blagues (au lieu de FERMER SA GUEULE), alors que le "Mal" en personne est sur le point de naître..
Les personnages représentés sont des esprits rationnels qui vont être confrontés au mal, et vont donc douter de leurs certitudes : les scientifiques et leur science, le prêtre et son dieu.. Du coup, on peut penser à Invasion Los Angeles, où pendant une bonne partie du film, le perso principal qui voit la « vérité » grâce aux lunettes, tente de convaincre les autres de la triste réalité à laquelle ils sont confrontés.
Les scientifiques, parlons-en. Quitte à aller dans les clichés, ils auraient au moins pu les rendre intelligents, parce que là, à les voir déambuler tout seuls dehors ou dans l’église abandonnée (tiens, comme dans Fog, une église !), on peut se poser des questions.
Mais rassurez-vous, les scientifiques n’ont pas le bénéfice de la connerie. Tout le monde est stupide ici. Ainsi, on se tape une scène d’une bêtise consternante : le héros saute d'une fenêtre qui donne sur une ruelle bloquée par des « méchants contaminés », et une fois dehors.. Remonte quelques secondes plus tard. A quoi sert donc cette scène ? A rien.
Par contre, si on fait une micro-analyse, on peut dire que l’idée d’encerclement des personnages principaux par des éléments extérieurs généralement hors-champ, rappelle une nouvelle fois Rio Bravo, dont Carpenter est un fan absolu, on le sait bien. On retrouvait déjà cette idée dans Vampires, ou Assaut, par exemple..
Cela dit, le fait que tous les personnages extérieurs contaminés dans Prince of Darkness fassent « équipe », rappelle le remake du Village des damnés que fera Carpenter, quelques années plus tard. Ainsi, tous les enfants dont accoucheront les femmes auront pour même but de causer la perte des habitants du village.
Précisons que le héros du film dont j’ai fait mention ci-dessus est interprété par un acteur pas super charismatique, et qui ressemble au "coach" du gamin dans Mysterious Skin, alors forcément, c'est pas évident de le prendre au sérieux. Mais c'est peut-être vraiment lui, en fait. Sa petite rousse d'amie est plutôt mignonne par contre, à défaut d’être utile.
Bien entendu, tous ses rôles d’idiots sont interprétés par des acteurs de seconde zone (cela va bien au film, d'un côté), auxquels on ajoute le fameux Alice Cooper dans un look qui lui sied à merveille et Donald Pleasance, habitué de Big John (il jouait le docteur dans le fameux Halloween). Alors imaginez qu'en VF, et avec des dialogues pas très très convaincants, cela n’arrange rien.
Au niveau de la temporalité, on constate que le film prend place durant une unique journée, comme Fog, Halloween ou bien Assaut. Bien entendu, le mal attendra la nuit avant de s’exprimer.
Pour cette raison, la première apparition du mal s’exerce par le rêve (ils reçoivent tous des messages de Satan): donc le mal se transmet mentalement au départ, comme dans Ghost of Mars, une dizaine d'années plus tard, où les contaminés « envoyaient » un virus en mourant, détraquant le cerveau des nouveaux infectés. Et puis, rappelons que Michael Myers s’évade d’un hôpital psychiatrique au début d’Halloween..
Sinon, le début est trop long (comme globalement tout le film, qu'on se le dise), mais comme dans tous les Carpenter, la BO est bonne.
Histoire de dire encore un peu de mal du métrage, ajoutons qu’il n’est pas du tout effrayant, ce qui lui fait donc un bon point comment avec le magnifique Ghost Of Mars.
Blague à part, la fin ouverte est une très bonne idée : Le héros est-il finalement aspiré de l’autre côté du miroir, ou non ? On ne saura pas, on ne peut qu’imaginer. Le miroir est donc une très belle trouvaille, représentant un lien de passage, entre deux univers parallèles, et opposés.
Dans The Thing et L'Antre de la folie, on assistait également à des fins pas vraiment évidentes, rappelons-le. Une façon de dire que le bien et le mal finissent toujours par se confondre ?
Pour conclure, je dirai qu’au départ, j’avais l’intention de faire une critique tout ce qu’il y a de plus banale, mais je me suis rendu compte à quel point Carpenter était un passionnant cinéaste, puisqu’il m’apparaissait plus intéressant de parler des redondances que l’on trouvait dans ses films, plutôt que du film lui-même.
Prince of Darkness est donc un objet théorique fascinant, et à ce titre, il a totalement sa place dans l’œuvre de Carpenter. Malheureusement, toutes les influences ou similitudes que l’on peut trouver entre ce film et le reste de la filmographie du cinéaste, y sont selon moi digérées. Ce qui a pour conséquence de donner naissance, non pas au mal cette fois-ci, mais bel et bien à un objet filmique bancal, et donc raté.