Soudain, la salle retint son souffle.
Alors que le dieu-cerf, des fleurs poussant sous ses pas, s'avançait lentement vers le corps inanimé - mort ? - d'Ashitaka, cent respirations se figèrent. Déposé sur la petite île par San, placidement veillé par le fidèle Yakkuru, l'adolescent gisait au cœur de la forêt, à demi-immergé, attendant son destin.
Cent diaphragmes restèrent en suspension, cent bouches béèrent en chœur dans un mutisme absolu. D'un simple souffle, l'onirique créature fana la branche que San avait plantée au chevet du garçon. Puis, plongeant la tête dans l'eau cristalline du lac, elle assécha le flot de sang qui s'échappait de la poitrine perforée d'Ashitaka.
Plus tard, quand une goutte d'eau tomba sur son visage et que le blessé ouvrit les yeux, cent paires de poumons exhalèrent à l'unisson, reprenant inconsciemment leur rythme mécanique. Certains s'essuyèrent les yeux, d'autres relâchèrent la main, serrée trop fort, de leur compagnon.
Alors que San s'efforçait de nourrir Ashitaka en lui donnant littéralement la becquée, dans une troublante confusion entre comportement animal et inclinaison sentimentale, la communion magique de Princesse Mononoke s'estompa peu à peu, et chacun dans la salle reprit le cours de sa propre respiration, et de sa propre existence.
Légèrement, imperceptiblement transformé, comme touché par la grâce.