Le devoir de vérité avant tout, avant même sa propre vie, voilà ce que Marie Colvin nous enseigne dans cette reconstitution sincère de sa vie, qui nous a donné un frisson dans le dos lors de la décision sacrificielle... Quelle femme. Quelle journaliste. Mais quel dommage que le film suive une ligne si classique, si sage, alors que son sujet ne l'est justement pas, avec cette incroyable reporter qui a toujours dépassé les limites et brisé les codes. On aurait adoré que cette audace se ressente dans la réalisation-même du film, mais l'on se contentera d'un récit pédagogique et très bien interprété par Rosamund Pike. Tout y est, sans faute, de son angoisse de revoir en rêve les cadavres des enfants mutilés sur les champs de guerre ou d'entendre en boucle les gémissements des victimes qu'elle croise, à son alcoolisme et caractère changeant dus à ces actes de barbarie qu'aucuns yeux ne peuvent supporter et qu'elle s'est juré d'accumuler jusqu'au dernier. On découvre alors cette casse-cou qui a couvert toutes les guerres atroces (du Sri Lanka au conflit syrien) en étant littéralement sur tous les fronts, et le respect s'impose de lui-même (et revient en force lorsque l'on voit la véritable dame en images d'archives au générique de fin, tout à fait le portrait dressé avec brio par Pike durant presque deux heures). Les qualités ne manquent pas à A Private War (allant jusqu'à inclure une chanson engagée d'Annie Lennox en thème du générique de fin), mais sa forme trop scolaire gêne la découverte de cette époustouflante femme qui a sacrifié sa vie - au figuré (en vivant d'angoisses et d'alcoolisme) et au littéral (un choix qui nous étouffe de respect) - au profit de la vérité. A nous de lui rendre hommage en prenant soin de toujours rester informés, quel que soit le sujet.