Né à Recife, comme son ami Kleber Mendonça Filho, Daniel Bandeira croit dans les vertus du film de genre pour parler de la réalité sociale au Brésil et, partant, des racines de la violence ancrée depuis longtemps dans la société. Propriedade est un thriller, qui emprunte parfois les codes de l'horreur, dans un cauchemar qui ne fait que s'amplifier durant 100 minutes. Ce qui apparaît clairement dans le film, poussé même à l'extrême, est l'absence de dialogue entre grosso modo les dominants (souvent blancs) et ceux qui les servent, taillables et corvéables à merci (souvent pas blancs). Mais il y a surtout la peur qui est deux côtés, obligeant les uns à se protéger (en voiture blindée, par exemple), tandis que les autres n'ont que leur rage et leurs poings pour se défendre. Ceci dit, le réalisateur est assez malin pour laisser le spectateur choisir son camp, même si on peut penser que la balance penche plutôt d'un côté. Propriedade est tout sauf confortable, puissamment symbolique et outrancier puisque c'est la voie qui a été choisie pour portraiturer un pays à la violence endémique et fracturé comme jamais, depuis les élections présidentielles de 2018. Comme quoi un film de genre peut cacher une œuvre politique et polémique qui suscite des débats fiévreux, depuis sa première présentation au Brésil, en octobre 2022.