C’est typiquement le genre de truc capable de me mettre en miettes. Sur le papier. Catherine rejoint sa meilleure amie Virginia, dans sa maison de campagne afin de se remettre sur pied : Elle vient à la fois de perdre son père et de se faire larguer. Giga loose. Sauf que cette douleur va en ouvrir une autre, cette douceur convoitée ne va récupérer que de l’hostilité. Petit à petit (Très difficile d’entrer dans le film au début) on comprend que leurs rapports ne sont pas si sains, que l’amitié qui les unit a déjà traversé des épreuves. On comprend alors que l’année passée, c’était Catherine qui était joyeuse, quand Virginia caressait les tréfonds de la déprime. Les deux années vont se mélanger créant un malaise crescendo puisque l’on ne comprend pas d’emblée ni quand les deux temporalités disjointes se chevauchent ; Enfin on s’en doute uniquement grâce aux visages des deux actrices – L’apparente linéarité avec les chapitres des jours comme dans un Rohmer se dissout finalement dans une temporalité labyrinthique. Et si Virginia s’était murée dans le silence un an auparavant (Quand son amie ramenait des potes, qu’elle se vantait de réussir professionnellement) Catherine (Plus narcissique) ne va pas accepter d’être recluse derrière et va basculer dans la folie : Menaces, paranoïa, démangeaisons, hallucinations. En film post Polanskien (On pense pas mal à Répulsion, Le locataire) Queen of earth trouve son rythme, il faut du temps certes mais il s’en dégage une vraie cruauté, une ambiance lourde, avec des moments perturbants comme ces errements dans les regards, des émotions enfouies qui n’osent pas surgir puis soudain explosent, le tout renforcé par le scary-beautiful score de Keegan DeWitt, fait de bruits de carillons et lointains sons de cloche. Le film pêche un peu quand il se veut post bergmanien, aussi paradoxal que cela puisse être tant Elisabeth Moss (Top of the lake) & Katherine Waterston (Shasta dans Inherent Vice) donnent beaucoup d’elles-mêmes. La référence Persona prend sans doute trop de place surtout lors de ce double monologue sous forme de confessions croisées qui a tout pour être bouleversant mais provoque un ennui poli. Ce plan qui vient saisir un visage puis l’autre, plein cadre, est magnifiquement chorégraphié mais il manque quelque chose. La mise en scène est souvent inspirée pourtant, visant parfois le Cassavetes d’Une femme sous influence, lorgnant aussi sur le Lars Von Trier de Melancholia. Mais le film irrite au moins dans son abondance picturale et l’illustrative langueur pré-automnale qui s’en dégage (Dommage que la maison de ne soit pas mieux filmée) mais aussi quand il s’extraie quelquefois de sa bulle Catherine / Virginia, car les rôles masculins ne sont pas très bien écrits. Quoiqu’il en soit j’ai fini par me trouver une place dedans. Ça ne m’a pas chaviré comme ça aurait dû / j’aurais voulu mais je suis plutôt enthousiaste de mon premier rdv avec Alex Ross Perry.