Quelle heure est-il ?, un leitmotiv et un motif dans la journée linéaire et non digressante d’un Scola peu scolaire et toujours friand d’amener le ton juste d’un monde auquel personne ne pense. Rien de plus banal pourtant qu’une journée entre père et fils, entre langue italienne et dialecte napolitain, où le naturel est la meilleure arme contre le non-dit et le malaise.


À travers la fausse assurance du fils (Massimo Troisi est d’ailleurs meilleur que son compère, mieux dans l’air du temps) qui se fissure quand son père (Mastroianni, le compère en question) voit qu’il est surtout joyeux quand il lui tourne le dos, et la propre curiosité attentive mais encombrante du père, c’est un dialogue sans trous qui s’installe, rythmé par ses blancs comme une vraie musique et sur un fond qui n’hésite pas, en-dehors d’un Mastroianni parfois un peu trop vieux jeu et d’une mise dans le bain qui force un peu la main, créant une atmosphère sonore à la fois trop belle et sporadique pour être raccord.


Au gré de pérégrénitions impeccables et d’une marche si réelle qu’on en oublie les pas au profit des paroles qu’ils soutiennent, c’est un duo sobre, parfois austère, qui fait de rares percées dans le film de genre d’une manière vaguement fragilisante, car elles nous font croire que le film est long et qu’on peut espérer quelque montée en puissance, mais non : les piques lancées sur l’un par l’autre sont comme absorbées, et les sentiments ont leur mèche mouillée par la pluie qu’on ne voit jamais mais qui recouvre le sol de la ville.


C’est un peu ça, l’heure qu’il est : une pluie qu’on a ratée et dont le seul témoin de la chute demeure sous la forme d’un voile scintillant sur le plancher des choses simples.


Quantième Art

EowynCwper
6
Écrit par

Créée

le 3 juin 2019

Critique lue 582 fois

3 j'aime

Eowyn Cwper

Écrit par

Critique lue 582 fois

3

D'autres avis sur Quelle heure est-il?

Quelle heure est-il?
Miamiam45
8

Critique de Quelle heure est-il? par Miamiam45

Aspects positifs :Interprétation exceptionnelle : Les performances de Marcello Mastroianni et Massimo Troisi sont saluées par la critique. Leur dialogue est rythmé et authentique, créant une...

le 29 mars 2024

Du même critique

Ne coupez pas !
EowynCwper
10

Du pur génie, un cours de cinéma drôle et magnifique

Quand on m’a contacté pour me proposer de voir le film en avant-première, je suis parti avec de gros préjugés : je ne suis pas un grand fan du cinéma japonais, et encore moins de films d’horreur. En...

le 26 oct. 2018

8 j'aime

La Forêt sombre
EowynCwper
3

Critique de La Forêt sombre par Eowyn Cwper

(Pour un maximum d'éléments de contexte, voyez ma critique du premier tome.) Liu Cixin signe une ouverture qui a du mal à renouer avec son style, ce qui est le premier signe avant-coureur d'une...

le 16 juil. 2018

8 j'aime

1

Mélancolie ouvrière
EowynCwper
3

Le non-échec quand il est marqué du sceau de la télé

Si vous entendez dire qu'il y a Cluzet dans ce téléfilm, c'est vrai, mais attention, fiez-vous plutôt à l'affiche car son rôle n'est pas grand. L'œuvre est aussi modeste que son sujet ; Ledoyen porte...

le 25 août 2018

7 j'aime

3