Rambo ou la mauvaise conscience de l'Amérique

Comment présenter ce personnage qui est devenu un véritable mythe des temps modernes ? un symbole du nationalisme et du militarisme reaganiens ? Stallone donnait vie en 1982 à un nouveau héros iconique du cinéma américain, certes il lui colle à la peau mais il a fait sa gloire, et ce premier volet souvent ironisé par des gens qui n'y comprennent rien et qui ne veulent voir qu'un film bourrin de gros bras, est avant tout une oeuvre dérangeante et parfois amère qui pose avec acuité le problème de la réinsertion des vétérans du Vietnam considérés comme des parias parce qu'ils ont perdu une guerre qui fut incomprise par l'opinion publique et le peuple américain.
Si le public d'alors a fait un triomphe à ce film c'est parce qu'il se sentait coupable quelque part. Tous les bouseux de flics qui cavalent après Rambo, à commencer par le shérif Teasle (incarné par le toujours excellent Brian Dennehy dans un rôle ingrat) et surtout le gros lard de Galt (joué par l'aussi excellent Jack Starrett dans un rôle encore plus ingrat) symbolisent cette frange américaine qui refuse d'entendre parler du Vietnam. Seul le personnage de David Caruso représente une opinion plus ouverte. Et c'est eux qui verseront le premier sang comme l'atteste le titre original Fist Blood. Ce message est délivré en filigrane, surtout dans la première partie jusqu'à l'évasion du poste de police, mais sans jamais s'apesantir, et la première scène entre Rambo et Teasle lorsque celui-ci ramasse en voiture ce type aux cheveux longs avec ce drapeau cousu sur sa veste, pour le remettre dans la bonne direction, est justement très révélatrice.
L'arrivée du colonel Trautman donne aussi du répondant à cet argument de culpabilité, d'ignorance, de mépris et de haines refoulées, et tout ceci est servi (mais non dilué) par de solides scènes d'action tournées au sein de magnifiques paysages. La séquence forestière où Rambo chope tous les assistants du shérif donne une idée de l'expérience du combat de certains Bérets verts : J'aurais pu tous vous tuer. En ville, tu fais la loi, ici c'est moi. Alors fais pas chier ou j'te ferai une guerre comme t'en as jamais vue... laisse tomber !. Le message est clair, ces flics de cambrousse ne sont pas de taille pour affronter une machine de guerre comme John Rambo, et comme le dit si bien Trautman : Je ne suis pas venu sauver Rambo de la police, je suis venu vous sauver de Rambo. Un des grands films de Stallone où il livre une interprétation très sobre, et un grand film tout court.

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le 27 sept. 2016

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