Comment prendre un film tel que Rampage ? À quoi devions-nous nous attendre quand nous nous apprêtions à nous lancer dans le visionnage d’un long-métrage pareil ? Franchement, la question ne se pose même pas ! Il suffit de se pencher sur l’affiche pour avoir déjà un aperçu : Dwayne Johnson en personne au milieu de grosses bêbêtes géantes en modes kaijus, avides de destruction. Ou bien sur le synopsis, ce dernier révélant un Dwayne Johnson en zoologiste – rien que ça, cela annonce d’emblée la couleur – devant arrêter d’immenses créatures mutantes, dont son gorille George, de détruire une ville. Dit comme ça, Rampage n’est rien d’autre qu’un bon gros divertissement bourrin, sans prise de tête et ne se prenant nullement au sérieux dans la veine des derniers projets du comédien (les Fast & Furious, Jumanji…). De quoi assurer le spectacle et garantir un agréable moment ! Cela aurait dû être le cas… Alors pourquoi la sauce ne prend-elle pas ? Pourquoi est-on indifférent à ce film au point de l’oublier une fois le visionnage terminé ? La faute revient justement à ce qui se présentait comme son atout : Dwayne Johnson.
Avant d’être un film, Rampage était un jeu vidéo. Plus exactement une borne d’arcade sur laquelle vous pouviez contrôler trois monstres géants (un gorille, un loup ou bien un reptile semblable à Godzilla) afin de détruire une ville. Un postulat simple et crétin, certes, mais un postulat tout de même ! Une base sur laquelle se reposer, bien qu’elle ne soit pas des plus solides. Des racines à mettre en avant pour essayer de se trouver une raison d’exister. Cela, le saviez-vous ? Que Rampage était l’adaptation d’un jeu vidéo ? Il ne serait pas étonnant que votre réponse soit « non ». D’une part parce que le jeu en question est littéralement tombé dans l’oubli, surtout pour les jeunes générations. De l’autre parce que le film ne se vante de ses racines, ne les met sur le devant de la scène. Il y fait des références – le fait de voir les monstres du jeu ou bien alors de voir ce dernier apparaître au détour d’une scène – mais ce de manière effacée et indifférente. Le long-métrage semble vouloir nier ses origines pour ne se concentrer que sur sa star pour attirer le spectateur. D’où cette déclaration que Dwayne Johnson soit le problème de Rampage. Et pour cause, depuis quelques temps, le comédien est devenu l’un des derniers représentants d’un star system déclinant qui assure le show rien que par sa présence. Qui donne aussitôt le ton du film rien qu’en imposant son nom au projet. En bref, un procédé qui permet aux réalisateurs, producteurs et scénaristes de ne pas se fouler, vu que le boulot leur est en quelque sorte déjà mâcher. Voilà pourquoi Johnson est le problème de Rampage : parce que les « géniteurs » du film se sont beaucoup trop reposés sur les lauriers de sa renommée.
On a avec nous la plus grande star actuelle du cinéma bourrin et crétin pleinement assumé ? Pourquoi aller au-delà ? Nous avons Dwayne Johnson avec nous, faisons un film à son image ! Pas de scénario, tout le monde s’en fiche ! Quitte à rajouter une bonne dose d’humour balourde que même Michael Bay n’aurait jamais osé exploiter (le gorille balançant quelques doigts d’honneur, par exemple). Ou bien de l’autodérision de gros bras, marque de fabrique du comédien depuis quelques temps. Et aussi, pourquoi s’embêter avec tout le reste ? Le casting ? Prenons des seconds couteaux un chouïa connus (Naomie Harris, Malin Akerman, Jeffrey Dean Morgan, Joe Manganiello…) mais qui s’effacent sans mal derrière notre célébrité en touchant leur cachet sans broncher. Surfons sur la mode actuelle des kaijus (après Pacific Rim et le reboot de Godzilla) et mettons notre Johnson au milieu de tout cela pour expliquer pourquoi notre film sera bourrin à souhait. Et comme on ne se foule pas, prenons un réalisateur ayant déjà travaillé avec le comédien et qui n’a d’yeux que pour lui. Bah tiens, Brad Peyton (Voyage au Centre de la Terre 2, San Andreas) est libre, embauchons-le ! Il saura dire oui à nos exigences et nous livrera un nouveau Dwayne Johnson movie, assurant l’entrée des billets dans nos poches. Oh, et pour les effets spéciaux, faites quelque chose qui fasse impressionnant – comme la motion capture – mais tant pis si vous singer ce qui a été fait auparavant (le travail effectué sur George n’arrive nullement à la cheville des primates de La Planète des Singes avec Andy Serkis).
Avec ce paragraphe, j’exagère sans doute le trait. J’appuie excessivement cette image des producteurs avides de billets verts et des réalisateurs portant l’étiquette de yes men. D’autant plus que je n’ai pas boudé mon plaisir devant Rampage, qui s’avère être un divertissement regardable. Notamment grâce à son humour balourd faisant mouche par moment, ses quelques séquences étonnement violentes et jouissives, et des scènes plutôt efficaces question adrénaline – comme cette introduction tendue et nerveuse qui rappelle le récent Life. Non, Rampage m’a divertit sans mal. Mais là où je voulais en venir, c’est que je n’ai pas vu une adaptation de jeu vidéo. Ni un film de kaiju, alors qu’il en a clairement les caractéristiques. Mais plutôt un énième film avec Dwayne Johnson, qui nous ressert la même formule qu’à l’accoutumée, sans chercher à faire plus. Et comme pour les Fast & Furious, avoir la même recette encore et encore commence à me lasser sérieusement…
Critique sur le site https://lecinedeseb.blogspot.com/2019/01/rattrapage-2018-rampage-hors-de-controle.html