Il y a de quoi être impressionné par la productivité de Steven Spielberg. Le réalisateur légendaire passe les années (même les décennies) avec une énergie qui pourrait laisser sur le carreau les cinéastes les plus aguerris. Chose encore plus incroyable, la maestria d'un Spielberg semble encore plus étincelante quand il enchaîne deux films à la suite. Cette année, quelques mois séparent l'excellent Pentagon Papers de son nouvel opus Ready Player One. Dans les deux cas, qu'il revienne en arrière ou se projette en avant, il regarde toujours dans la même direction : le présent. Les journalistes passionnés sont aussi essentiels aujourd'hui qu'il y a quarante ans, et la même chose s'applique aux amoureux de la pop-culture. Il ne tient qu'à eux (et qu'à nous, de facto) de faire l'Histoire ou du moins la partager.
Ready Player One, c'est un film qui aura une place bien particulière dans la filmo de tonton Steven. Le livre dont il est adapté (écrit par Ernest Cline) est un ode à ces années 80/90 qui continuent d'irriguer l'imaginaire collectif, et dont S.Spielberg se pose comme l'un des principaux démiurges (même s'il est beaucoup plus que ça). On pouvait craindre un spectacle s'apparentant à de l'auto-congratulation ou du cynisme infatué. Il n'en sera rien. Spielberg n'a pas envie de perdre son temps à essayer de le rattraper.
Les vingt premières minutes balaient sans ménagement la concurrence, rappelant qui est le patron en terme de spectacle (qui en doutait?). Et j'aime autant vous prévenir que le reste est au niveau. Je pense notamment à une séquence de mise en abyme d'ores et déjà culte. En plus d'une aventure collective fabuleuse, Ready Player One est également une quête personnelle invitant l'individu à s'extirper de l'illusion pour retrouver le réel. Les références pleuvent évidemment, mais jamais elles ne prennent pas sur la virtuosité de génie qui se déploie ici. Parce qu'il ne s'agit pas tant de célébrer cette pop-culture mais de réfléchir sur ce qu'on en fait (ou pas). Une fois passé le cap du divertissement haut de gamme que représente l'Oasis, que reste-t-il de ces références? Quels étaient leurs buts? Divertir oui, inspirer évidemment. Mais à quoi sert cet "héritage" s'il n'a aucune répercussion sur la vie réelle? Comme d'autres l'ont fait avant lui (Danny Boyle avec T2 Trainspotting par exemple), Spielberg interroge notre rapport à cette nostalgie et s'inquiète de la voir prédominer sur le présent. En plus de rendre ces références superficielles, elle encombre le terrain pour l'avenir.
On peut tiquer sur le message asséné de manière trop maladroite, il a au moins le mérite d'être clair. Et on suit avec grand plaisir la bande de comédiens (Tye Sheridan, Olivia Cooke, Ben Mendelsohn) et leurs avatars. On ne peut pas non plus oublier la bande originale concoctée par Alan Silvestri et la pléthore de tubes 80's. Enfants de tout âges, accrochez vos ceintures, le nouveau bolide de Spielberg embarque passé et présent vers son seul OASIS: l'avenir.