Scénariste de plusieurs films d'Alejandro Amenábar , Mateo Gil nous propose avec Realive, son troisième film en temps que réalisateur, une plongée réflective dans ce qui reste certainement notre peur la plus profonde : mourir.


SF tranquille


Marc (Tom Hughes), jeune entrepreneur à l'avenir prometteur, apprend qu'il est en proie à un cancer incurable. Incapable d'accepter l'idée de sa mort prochaine, il décide de se faire cryogéniser afin que, six décennies plus tard, une compagnie scientifique à la pointe de la technologie médicale le ressuscite. Le film de SF minimaliste est presque devenu un genre à part entière. Misant plus sur des réflexions poussées et des concepts forts que sur des effets spéciaux spectaculaires, ces œuvres sont souvent des productions à petits budgets réalisées par des cinéastes passionnés et pleins de bonnes attentions. Cependant, nombreuses sont celles qui, si elles ne manquent pas d'inventivité, peine à véritablement convaincre (The Signal, Moon ...).  Realive en fait partie.


Le film n'en garde pas moins bon nombre de qualités et l'une d'elle est de parvenir à jongler avec beaucoup d'éléments idéologiques et à faire véritablement réfléchir autour d'un sujet complexe et délicat. Mateo Gil nous raconte ici qu'à trop vouloir vivre éternellement, on en oublie de vivre tout court. C'est la dure réalité que Marc apprendra petit à petit lorsqu'il se réveillera dans ce nouveau monde. Realive jongle habilement entre les séquences futuristes et les flash-backs d'une vie passée. Il en résulte même un rythme harmonieux et fluide, pourtant pas évident à trouver avec ce genre de construction narrative. Malheureusement, cela en fait aussi un objet filmique très monochrome qui ne créé jamais vraiment la surprise. De plus, Realive a du mal à user d'autre chose qu'une esthétique vu de nombreuses fois au auparavant et n'évite pas certains clichés scénaristiques inhérents au genre (la découverte des tests effectués avant la résurrection de Marc).


I live, I die, I live again


Mais le film prend certains paris qui s’avéreront payants, comme celui de placer au centre de son intrigue un personnage plein de failles, et donc finalement très humain. Car Marc est, en fin de compte, un monsieur tout le monde qui suit parfaitement le schéma de la vie bourgeoise dans laquelle sa naissance l'a placé. Il est jeune, beau, riche, il a des amis, du succès auprès des filles... Mais peut être a-t-il toujours tout pris un peu trop pour acquis et ne peut accepter l'aspect terriblement arbitraire de la mort. C'est avant tout dans les faiblesses de l'Homme que se reflète son humanité et on ne peut s'empêcher d'être bouleversé par la terrible mais inévitable prise de conscience de Marc. À travers ce portrait d'être en perdition, le réalisateur déverse de fascinantes réflexions sur notre rapport à la vie et à la mort.


L'Homme est probablement la seule espèce ayant conscience de sa propre fin et c'est sûrement pour cette raison qu'il se noie dans des artifices religieux le maintenant dans l'illusion que la mort n'est qu'une étape. Fuir la dure réalité d'une existence éphémère, voilà peut être l'ultime quête malsaine de notre vie physique. Mais, comme nous le raconte Marc (à l'aide d'une voix off parfois envahissante), la vie n'est pas là pour répondre à une quelconque force divine, la vie n'est pas sacrée, la vie est une énergie, un mouvement et nos corps en sont les vaisseaux. Peut être que vivre, c'est avant tout être dans le moment présent. Marc l'apprendra de plus en plus douloureusement, lorsqu'il découvrira un monde qui n'est plus le sien, menant une vie qui n'est plus la sienne. Toutes ces réflexions fascinantes, Realive les aborde de façon approfondie mais peine malheureusement à  les faire vivre à travers ses images, usant trop souvent de dialogues artificiels.


Realive nous transporte dans un monde de désillusions et de prises de conscience. Mateo Gil accouche d'un long métrage qui ne manque pas de questionnements passionants mais qui ne parvient jamais vraiment à proposer autre chose qu'un patchwork philosophique à l'esthétique éculée. Une œuvre qui reste cependant attachante, paradoxalement très ouverte sur le monde (puisqu'elle soulève des interrogations qui nous concerne tous) mais également très sombre et nihiliste, comme en témoigne une scène finale à glacer le sang qui laisse apparaître toute la folie auto-destructrice de l'Homme.


critique originale : http://www.watchingthescream.com/after-death-critique-de-realive/

Créée

le 13 avr. 2017

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Aurélien Z

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