Porn to be alive
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Mikey ( Simon Rex ) est un acteur de talent pour un super film de Sean Baker, lorsqu'il décide de se refaire dans son Texas natale, après une carrière foirée. Un homme victime de lui-même et de sa pseudo-célébrité. Un tchatcheur de première, aux promesses faciles, qui croit encore en lui et à ses performances de pornostar, face à son ex-partenaire et épouse, Lexi ( Bree Elrod ). Une image qui lui rappelle son échec. Des retrouvailles aux allures de mélancolie déchirante, pour des mots qui ne suffisent plus à exprimer ce réveil malsain. Une rencontre assez comique quand elle le somme d'appeler les flics, mais triste aussi quand le paysage qui l'entoure des années plus tard, n'est qu'étendues désolées et ensoleillées. Une banlieue du Texas aux dégradations environnementales, pleine de raffinerie de pétrole qui se dressent de façon terne, dans toutes ces vies et ces intérieurs qui se sont cristallisés dans une forme de rituel, où tout est déjà perdu, où rien ne change. Une génération de perdants dans un éternel recommencement. Alors malgré cet horizon franchement sombre, Mikey veut continuer d'y croire, sans relâche, ne pas s'avouer vaincu, tout en continuant d'apprendre de ses échecs, malgré les humiliations et les défaites.
Sean Baker réussi à filmer cette histoire avec humour, mais aussi tendresse. Le rôle de Mikey, un perdant irréductible, devenant l'expression d'une ville et de sa solitude, loin de tout, figé dans le temps. Qui continue de vivre de toutes ces petites habitudes, ces trafics de jeunesse, dans un cycle infini, d'un réalisme sale et triste. Un réalisateur qui synthétise de façon remarquable toutes la profondeur de ses thèmes. Avec humanité, et dans lequel brille une certaine critique sociale. Où l'on peut y voir une évidente exploitation sexuelle, l'objectivation féminine, le populisme trumpiste, le chômage, la pauvreté structurelle, et ces commerces illicite se transmettant de mère en fille.
Les effets du Porno, et sa consommation sans limite, qui auraient conditionné les comportements et les rapports affectifs des plus jeunes. D'une génération après l'autre, et notamment Fraise ( Suzanna Son ), une brillante adolescente dans son interprétation de jeune Lolita, chaude comme la braise, aux jolies taches de rousseur. Qui ont su sourire à ce séducteur narcissique qu'est Mikey. Un manipulateur émotionnel dont personne ne voulait le retour, et pour qui elle a su faire fondre le cœur.
Lui qui l'a rêve à présent, dans un désir brûlant, nu à ses côtés, dans des scènes immorales. Une opportunité qui ne se représentera pas deux fois, dans un tel bled pourri. La seule possibilité pour Mikey de se réinventer, s'évader de cette périphérie au lieu arrêté. Afin de découvrir enfin toutes ces couleurs que les années ne lui ont jamais données.
Pour une fin au conte de fées pervers. Douce comme une fraise, qui se répète encore et encore, tant que la chair reste fraîche et jeune. L'envie de la dévorer, où chacun tourne en rond, et Mikey lui revient encore et toujours au même point de départ.
Créée
le 27 nov. 2023
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86 j'aime
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