J'ai un problème avec le cinéma de Jacques Audiard. Je ne parviens pas à l’apprécier, à entrer totalement en résonance avec son propos, sans aucun doute à cause de sa forme.
J’avais oublié que j’avais vu que ce film il y a longtemps. Ce n’est que sur cette revoyure que je réalise cet oubli. D’autant plus dingue qu’il a tout de même de sérieux atouts marquants à faire valoir!
D’abord, le trio d’acteurs est formidable. Même Matthieu Kassovitz, c’est peu dire! Il joue très bien le benêt, le paumé qui s’accroche désespérément à Jean-Louis Trintignant, sans en rajouter dans les effets.
Jean-Louis Trintignant est immense comme d’habitude. Avec un rôle compliqué de râleur, violent, mais qui, peu à peu, se laisse émouvoir et s’attache à son boulet.
Jean Yanne est peut-être celui qui a le rôle le plus simple à jouer. Il garde la sobriété nécessaire pour que son obsession progresse naturellement sans heurt. Très propre. On ne peut qu’applaudir devant cette direction d’acteurs impeccable.
Je me heurte plutôt au traitement esthétique, au montage très elliptique, la façon dont la caméra suit les personnages et enfin, plus généralement, la photographie très humide et froide de Gérard Sterin. L’ensemble formel me rebute. Physiquement, il est beaucoup trop associé à des images réelles de mon enfance, à un passé désagréable : l’humidité et le froid des années 70 de mon enfance. Il y a dans cette photo quelque chose de physiquement qui me dérange.
Mais ce traitement visuel est totalement légitime, j’en suis conscient : il s’agit d’une série noire. Le film a tout intérêt à concrétiser le malaise, l’espèce de précarité psychologique et matérielle des personnages.
C’est bel et bien un écueil personnel, subjectif qui altère mon sentiment à l’égard du film. Difficile pour moi de faire abstraction : le peu que j’arrive à m’imposer me certifie que le film est très bon, bien écrit, bien mis en scène et bien joué, une descente dans les abîmes maîtrisée. Me reste plus qu’à espérer que ça passe avec l’âge.
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