Au départ prétentieux, le documentaire fait ressortir ce qu'il a de plus hypocrite en encensant la personnalité qu'on va suivre. Le précédent étant sans nul doute le documentaire putassier sur Jodorowsky.
Alors qu'on suit Benjamin Millepied dans les couloirs de l'Opéra, et qu'on fait connaissance de son assistante, on se dit que le temps va être long si on doit suivre les pérégrinations de Martine à la danse. Or peu à peu le documentaire se relève, et on entre dans le processus de création.
Si au début on est peu chamboulé par les dessins, car on est venu pour de la danse, Benjamin Millepied révèle ce pourquoi il chamboule autant le petit monde fermé de l'Opéra. Car loin de se lancer dans l'unique apanage de la création d'une danse, le documentaire sait se montrer tout autant utile face à une bureaucratie rétrograde. Millepied en tant que directeur doit donc autant jongler avec son but premier de la danse, que des multiples aléas de la vie de château qui n'aime pas qu'on bouscule ses traditions.
Le film prend donc son ampleur en laissant la parole aux petits rats devenus danseurs, où la rigueur vient perturber l'élan créatif de chacun. On sent d'ailleurs dans les discours que deux écoles s'affrontent : l'éternel sévérité militaire et dérangeante, ou la liberté d'un enseignement plus humain et libérateur du corps, pour le seul but de l'excellence.
La caméra assure alors sa discrétion pour mieux mettre en lumière le mouvement sur une bande son des plus plaisante, allant jusqu'à voler la vedette à la musique d'origine.
On est donc en phase avec les danseurs, le trac vient nous saisir jusqu'au moment final pour voir à l’œuvre non pas seulement une danse mais une manière de penser différente. Car l'élan d'espoir que suscite l'arrivée de Millepied est d'autant plus fragile qu'on sait au moment où est projetée cette Relève que l'homme a abandonné la partie.
Cette Histoire d'Une Création suscite donc autant la fascination d'un possible changement que la dureté d'une institution poussiéreuse.