Réputé et reconnu pour ses films comiques, Gilles Grangier excellait également dans les films noirs tels que Le rouge est mis, Le désordre et la nuit ou encore 125 Rue Montmartre. C'était certainement le registre dans lequel Grangier était le meilleur, et Reproduction Interdite alias Meurtre à Montmartre figure clairement dans ses meilleurs films, dans la même veine que 125 rue Montmartre qui sortira plus tard. 


Reproduction Interdite c'est la fresque d'un marchand d'art : Marc Kelber (Paul Frankeur) la cinquantaine passée qui se retrouve malgré lui dans un bourbier dont il ne peut sortir qu'en s'associant avec un faussaire. C'est un honnête homme sans histoire, mais qui traîne derrière lui un profond mal-être suite à sa situation professionnelle qu'il juge insatisfaisante. Ses affaires ne marchent pas, son couple bat de l'aile et les rapports avec son beau fils sont conflictuels, et pour couronner le tout, il se retrouve incapable de rembourser ses crédits. Pour le sauver, il lui faut un gros coup, un Gauguin ! 


C'est un thème ambitieux abordé par Grangier dans le milieu des représentations d'art et des faussaires auquel le public n'a pas forcément accroché au vu du faible taux d'entrées en salles lors de la sortie du film. Reproduction Interdite a donc suscité un certain désintérêt, notamment pour son sujet complexe et technique.


Bien que les faits se déroulent à Montparnasse, Reproduction Interdite est renommée Meurtre à Montmartre histoire de générer un intérêt plus conséquent, mais ça ne fonctionne toujours pas et cette perle de Grangier tombe dans l'oubli injustement, malgré sa grande qualité et des similitudes comparables à 125 rue Montmartre qui connaîtra un succès bien plus important.

Film populaire représentant le quotidien de ce pauvre type attachant endetté jusqu'au cou et qui décide de vendre des faux tableaux pour s'en sortir financièrement. Il bascule dans une voyoucratie presque par hasard après s'être fait berner par son futur associé Jacques Lacroix (Michel Auclair) pour qui il voue une certaine fascination malgré des personnalités totalement opposées.


La combine ne fonctionnerait pas sans le troisième homme : Claude Watroff (Gianni Esposito), le peintre chargé des reproductions. Malgré son importance centrale, paradoxalement, c'est peut-être le personnage le plus lassant du film, artiste alcoolique qui regrette des reproductions à des fins malintentionnées, répétitif et un jeu d'acteur de la part d'Esposito pas forcément à la hauteur de ses camarades du film.


L'attribution des rôles est étonnante, mais tout à fait diversifiée. On retrouve Paul Frankeur qui tient là, et c'est rare pour être signalé, le rôle principal dans un film où les expertises stressantes sont accompagnées de coups de trompettes, histoire de bien faire monter en pression notre marchand d'art. 


Michel Auclair dans la peau de cet élégant escroc, Annie Girardot, la compagne de Claude, pour son troisième rôle au cinéma, à peine 25 ans à l'époque, mais déjà lumineuse, Marcel Bozzuffi dans le cercle d'amis du jeune couple, il retrouvera Annie dans le prochain film de Grangier : Le rouge est mis.


Ce qui est plaisant dans ce film, au-delà de la qualité de sa mise en scène, c'est la représentation authentique de la France des années 50 qui vient s'opposer aux critiques de la Nouvelle Vague, comme en témoignent les scènes tournées essentiellement en extérieur et en décor naturel, les prémices d'un aspect que Grangier saura parfaitement mettre en valeur dans 125 Rue Montmartre. 


Ressorti par Pathé il y a quelques années, Reproduction Interdite connaît un regain d'intérêt encore insuffisant aux vues des notes et des faibles impressions qu'il suscite sur SensCritique. Cependant, il a fait l'ouverture du festival Lumière à Lyon en 2021 et fait des salles combles dans les cinémas, belle récompense pour cette œuvre mal estimée à sa sortie et qui a pu être finalement réexpertisée de nos jours. 


dima78
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le 10 nov. 2024

Modifiée

le 10 nov. 2024

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dima78

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