En 2004, Resident Evil : Apocalypse dépasse son prédécesseur en termes de recettes au box-office mondial. Ce second volet engrange environ 129.000.000$ de recettes contre 102.000.000$ pour le premier film. Ce succès commercial, malgré des critiques mitigées, confirme l’engouement du public pour l’adaptation cinématographique du jeu vidéo culte de Capcom. Fort de cette performance, les producteurs n’hésitent pas à donner immédiatement leur feu vert pour un troisième opus, consolidant ainsi la saga Resident Evil comme une franchise cinématographique durable.
Paul W. S. Anderson avait cédé la mise en scène du second opus à Alexander Witt pour se concentrer sur l’écriture et la production. Un choix qu’il renouvelle pour le troisième film, qu’il écrit comme la conclusion d’une trilogie. À ce stade, Anderson conçoit encore la saga comme une histoire ayant une fin définie, avec une évolution progressive du personnage d’Alice.
Pour la mise en scène, Paul W. S. Anderson choisit Russell Mulcahy, cinéaste australien. Autrefois maître d’une mise en scène stylisée et inventive, Mulcahy a perdu de sa superbe au fil des ans, et en plus, va se retrouver ici bridé par les exigences du studio et la vision très encadrée d’Anderson. Un manque d’identité artistique regrettable pour Mulcahy, qui fut autrefois une figure marquante du cinéma de genre.
L’écriture du scénario n’a pas été de tout repos pour Paul W. S. Anderson. Alors qu’il envisageait ce troisième opus comme la conclusion de la saga, les studios annoncent en plein développement du film qu’un quatrième opus est déjà prévu. Cette décision commerciale oblige Anderson à revoir ses plans et à laisser des portes ouvertes pour une suite. L’histoire ne peut donc pas se conclure définitivement, ce qui impacte certains choix narratifs et empêche une vraie finalité à l’arc d’Alice.
En 2007, Resident Evil : Extinction sort dans les salles et propose un virage marqué vers l’action post-apocalyptique désertique (d’où le choix de l’australien Russell Mulcahy). Si le film continue d’explorer l’univers du jeu vidéo, il s’éloigne encore davantage de ses racines horrifiques pour embrasser une approche plus spectaculaire et survitaminée.
L’une des grandes nouveautés réside dans son cadre post-apocalyptique désertique. Contrairement aux précédents volets qui se déroulaient principalement dans des environnements urbains sombres et claustrophobiques, cet opus fait le pari d’une action en plein jour. Ce choix esthétique rappelle l’univers de Mad Max et renouvelle l’ambiance de la saga en lui offrant une dimension plus aride et poussiéreuse. Les vastes étendues désertiques permettent une mise en scène plus aérienne et mettent en valeur des décors et des costumes soignés, notamment avec un look survivaliste renforçant l’aspect « road movie » du film. Ce changement d’ambiance est une bouffée d’air frais pour la saga, même si l’éclairage diurne peut parfois atténuer l’impact horrifique des scènes de tension.
Le film introduit un personnage emblématique des jeux vidéo : Claire Redfield. Toutefois, les fans du jeu doivent vite oublier la Claire qu’ils connaissent, car son rôle au sein de l’intrigue diverge radicalement. Ici, elle n’est ni une sœur en quête de Chris ni une survivante à la recherche de vérité, mais la leader d’un convoi de rescapés luttant pour leur survie. Son objectif est simple : protéger son groupe, leur trouver de la nourriture et, si possible, un refuge sûr loin de l’infection. Une approche qui s’éloigne totalement du matériau original, mais qui permet d’intégrer Claire dans cet univers cinématographique de manière cohérente, bien qu’elle perde une partie de son rôle de combattante emblématique des jeux.
Ali Larter livre une performance solide et parvient à incarner une Claire Redfield crédible, déterminée et pragmatique. Malheureusement, son personnage souffre du même problème que la plupart des figures secondaires de la saga : il est constamment éclipsé par Alice. La protagoniste surpuissante domine chaque scène et laisse peu de place aux autres personnages pour briller. Claire, qui aurait pu être une co-leader inspirante du convoi, se retrouve reléguée au second plan, limitant l’impact de son personnage et la dynamique du groupe.
Oded Fehr et Mike Epps déjà présents dans Resident Evil : Apocalypse font leur retour et apporte une certaine continuité à la saga, mais ce qui est intéressant, c’est que leur statut d’anciens personnages ne les protège pas de la menace omniprésente. Le film ne fait pas l’erreur de les épargner sous prétexte qu’ils sont connus du public, ce qui maintient un niveau de tension appréciable. À leurs côtés, de nouveaux survivants viennent compléter le convoi : Spencer Locke, Ashanti, Christopher Egan et Linden Ashby (éternel Johnny Cage). Chacun apporte une dynamique différente, bien que leur développement reste limité, et que certains servent principalement de chair à canon pour les scènes d’action.
Si Claire Redfield rejoint l’aventure, un autre personnage clé manque cruellement à l’appel : Jill Valentine. Elle était censée continuer son arc narratif, mais son interprète, Sienna Guillory, était retenue sur le tournage de Eragon. Son absence laisse un vide, surtout pour les fans du jeu qui espéraient voir sa relation avec Alice se développer davantage. Ce manque se fait d’autant plus sentir que le film aurait pu bénéficier d’un duo féminin fort entre Claire et Jill, ce qui aurait équilibré la dynamique de groupe et diversifié les interactions.
Si la première partie du film séduit par son ambiance désertique immersive, ses costumes marqués par la survie et ses péripéties haletantes (attaques de zombies, assaut des corbeaux infectés), l’autre moitié en laboratoire peine à convaincre. Le rythme s’essouffle et l’intrigue devient plus mécanique, retombant dans les schémas classiques des installations secrètes et des expérimentations d’Umbrella. De plus, les scènes d’action souffrent d’une mise en scène parfois confuse, où la lisibilité des combats et des affrontements est entravée par un montage trop rapide et un abus de ralentis. Un contraste regrettable avec la tension et le dynamisme de la première désertique.
Le conflit entre Milla Jovovich et Iain Glen amorcé dans l’opus précédent, continu ici. Cependant, cette rivalité peine à fonctionner en raison de l’évolution excessive des pouvoirs d’Alice. Elle est devenue trop forte, trop invincible, au point que toute notion de suspense s’effondre. Les enjeux disparaissent, car on sait pertinemment qu’elle ne peut pas mourir, d’autant plus qu’elle possède une multitude de clones. Cette surenchère de puissance nuit gravement à l’immersion, car elle prive le film de toute véritable menace pour son personnage principal. Le combat final contre le Tyran est totalement expédié et décevant, n’offrant aucun affrontement mémorable si ce n’est une pâle copie de la scène du laser du premier opus.
Autre figure emblématique des jeux vidéo, Albert Wesker fait ici sa première apparition sous les traits de Jason O’Mara. Malheureusement, son rôle est purement fonctionnel : il ne sert qu’à préparer les futurs films et n’a aucune réelle utilité dans l’intrigue de cet opus. On a la nette impression que son personnage a été ajouté tardivement au scénario pour assurer une continuité et annoncer les suites. D’ailleurs, ce manque d’investissement dans le personnage est confirmé par le fait que Jason O’Mara ne reviendra pas dans les épisodes suivants.
Resident Evil : Extinction apporte un vent de fraîcheur grâce à son cadre désertique. Malheureusement, son potentiel est gâché par une autre moitié en laboratoire bien moins inspirée et une héroïne devenue trop puissante pour être réellement menacée. Si le film reste divertissant et propose quelques bonnes idées, il marque aussi un tournant où la saga s’éloigne définitivement de ses origines horrifiques pour devenir un pur produit d’action survitaminé. L’absence de Jill Valentine, le traitement trop effacé de Claire Redfield et un antagoniste sous-exploité empêchent cet opus d’être à la hauteur de ses ambitions. Malgré ses défauts, Resident Evil : Extinction reste un épisode clé de la franchise, servant de transition vers une suite encore plus décomplexée et spectaculaire.