On aime Guiraudie parce qu'il est seul, parce qu'il est seul à faire un cinéma qu'il ne devrait pas être seul à faire - celui de la poésie. Et encore une fois, il s'y tient, il fait un vrai film de poète, pasolinien et très étrange. Le film est peut être un peu raté, très inabouti, bancal et pas toujours fulgurant. Mais je ne peut m'empêcher de l'aimer. Je trouve qu'il a ici un peu de mal à sublimer ce qu'il filme, la faute à un montage parfois trop rapide qui ne parvient pas à accrocher les scènes et les idées. D'où cette impression d'un film qui aurait pu aller tellement plus loin, prenant plusieurs pistes qui parfois riment entre elles mais qui ne fonctionnent jamais vraiment ensemble. L'Inconnu du lac était sans doute plus efficace, moins radical, mais beaucoup plus gracieux. La fin est cependant magnifique, elle tranche d'ailleurs totalement avec celle du précédent, qui fermait vraiment l'univers clos du film. Là, Guiraudie filme une ouverture, comme une injonction faite pour l'avenir, à l'image de son sublime titre : rester vertical, bien droit devant les loups. Le film ne clôt rien, comme s'il venait de commencer, en forme de point d'interrogation rageur. On peut regretter ses défauts mais saluer ses fulgurances uniques de cinéma. C'est un film qu'il faut défendre, comme on doit défendre les poètes, puisque seuls eux sont aujourd'hui capables de nous ouvrir un peu les yeux. Et les yeux, on les ouvre devant Rester Vertical : ici devant la beauté d'une nuit campagnarde, là devant un accouchement en temps réel...Guiraudie ose, il s'en fout, et même si celui là n'est pas son meilleur film, son cinéma est nécessaire !