En sortant de "L'inconnu du lac", je m'étais promis de surtout ne plus aller voir un film de Guiraudie, tant, je n'ai pas peur des mots, je m'étais impérialement emmerdé ! Et puis, parce que nous sommes à l'heure des bilans d'une année 2016 assez timorée au niveau du cinéma français, et qu'un ami, grand fan, m'a proposé avec des yeux de Gollum de me prêter "son précieux" DVD, je me suis laissé tenter. Résolution pour 2017 : ne jamais trahir ses promesses !
Guiraudie dit que "Rester vertical au moins, c’est typiquement le genre d’histoire que je ne vois pas au cinéma" là dessus, on ne peut lui donner tort ! Le seul problème, c'est que l'on ne voit pas cela dans la vraie vie non plus. Franchement ça se complique ! Qu'est-ce donc que ce film ?
Dans une version purement empathique (si si je sais être gentil parfois) on peut imaginer que tout cela n'est qu'une longue (mais alors très longue) transcription visuelle d'un cauchemar que le réalisateur a du faire. Compte tenu de l'intensité de certaines scènes, on peut comprendre qu'il en fut marqué car jaillissent autant de situations et de rencontres/poursuites improbables, qu'une multitude de fantasmes sexuels. Cela viendrait excuser le côté approximatif des dialogues, de certains plans, cette lumière totalement défraichie et le jeu des acteurs sortis tout droit d'une troupe de théâtre amateur de seconde zone. Puisque nous sommes dans une imagerie de mauvais rêve, ce qui compte n'est pas le visuel, mais le ressenti. Il est bien connu que l'on sort d'un cauchemar comme d'un mauvais film, le corps tendu, la bouche fielleuse et la tête bouillonnante ! Mais à ce niveau, cela n'a aucun intérêt pour la majeure partie des spectateurs, mais au moins le réalisateur s'est fait plaisir. Quid.
Seulement voilà, en lisant le dossier de presse, on se rend compte que Guiraudie ne justifie pas cet épouvantable et nauséeux film sur cette explication. Il le prend au sérieux. Il faut donc chercher un autre sens au récit et tenter de comprendre.
Entre un Léo (le héros) dépouillé au sens propre comme au figuré, une Calamity Jane chaudasse des montagnes qui débite sa diatribe sur les loups comme un gamin ses tables de multiplication, son père bourru et pas net, un éphèbe vicelard, un vieux paysan fou de Pink Floyd (vraisemblablement un vétéran des communautés hippies des 70's), la galerie de portrait vaut son pesant de Tussauds !
En plus, il s'en passe des choses, et Giraudie de nous infliger des séquences dont le bien fondé est indéterminé, scène d'accouchement (ah oui il y a un bébé aussi dans le film, mais bon c'est accessoire), un broute minou 100% bio, une rebouteuse des temps modernes qui installe sur ses "patients" des électrodes végétales, des sdf pillards, le pauvre vieux paysan baba cool détroussé (au propre comme au figuré !) et j'en passe !
Il n'y a aucune logique, moins encore d'utilité à ce déballage un poil pervers, un film comme on en a jamais vu on vous dit !
Et puis ce rapport à l'homosexualité (déjà très space avec "L'inconnu du lac") qui s'affiche est pour le moins spécieux ! Cette vision tiendrait presque du refoulement avec sa part fantasmatique malsaine qui prend le dessus.
Cette forme de cinéma minimaliste, limite surréaliste, a connu son apogée dans les années 70 (je pense à Akerman, Goretta voire Rivette...). Les oeuvres parfois difficiles d'accès avaient néanmoins un sens, un discours, elles marquaient les consciences par l'image, peu sur les mots. "Rester vertical" est creux, vide de toute substance. Il donne l'impression d'un film d'école, de ceux que l'on fait pour épater la galerie !
Bref, en littérature, on dit d'un mauvais écrivain qu'il est un écrivaillon, dommage qu'on ait pas trouvé un équivalent au mot réalisateur, car il aurait pu qualifier sans hésitation Alain Guiraudie !