Quand j'étais gamin ("et merde, il remet ça" allez-vous gémir), je n'étais pas du genre à m'identifier à Ricky Stratton (et sa belle vie pour les connaisseurs), à Brandon Walsh et encore moins à ce gros connard de Dylan McKay qui passait son temps à se morfondre sur ses problèmes avec son papou tout en conduisant sa Porsche pour aller faire du surf et, accessoirement, culbuter la Brenda dont on ne savait plus trop d'ailleurs si on avait envie de lui faire subir les ultimes outrages ou lui dézinguer la gueule au shotgun.


Non, moi je me voyais plutôt en Marty McFly, ce gars pas très grand, pas très costaud, pas franchement populaire et infoutu capable d'arriver à l'heure au bahut. Bon, je ne faisais pas de skate aussi bien que lui et je ne trainais pas avec un vieux savant fou mais j'aimais bien le fait que le gus créchait dans une banlieue un peu moisie et avait des parents dont il devait sûrement avoir un peu honte de présenter à sa dulcinée qui changera de visage à partir du second volet mais ceci est une autre histoire.


Bref, Back to the Future fait partie de ces doux souvenirs d'enfance qui ont petit à petit donné naissance au cinéphile légèrement ahuri que je suis devenu au fil du temps et des supports. Produit par Steven Spielberg himself pour le compte de sa société Amblin et de Universal après l'abandon de Columbia et le refus de Disney, Back to the Future est né de l'imagination du scénariste Bob Gale, suite à ses interrogations concernant les années lycée de son paternel et sur le jeune homme qu'il devait être à l'époque.


Approché par Bob Gale, le cinéaste Robert Zemeckis apportera sa touche personnelle au script, attendant toutefois le succès de Romancing the Stone avant d'accepter le poste de metteur en scène, les échecs successifs de ses précédentes collaborations avec Steven Spielberg le laissant dans la crainte d'une fin de carrière prématurée. Le produit fini, budgétisé à moins de vingt millions de dollars, deviendra le succès retentissant que tout le monde connait, récoltant plus de 210 millions de dollars sur le sol américain, et dépassant les 380 millions à l'international.


La recette du succès ? Sûrement ce mélange détonnant d'humour, de merveilleux et d'émotion, croisement improbable entre The Time Machine et un Rebel Without a Cause en plus léger. Un sens du spectacle parfaitement millimétré, bénéficiant de la mise en scène au cordeau de Zemeckis, de la partition à la fois mystérieuse et palpitante d'Alan Silvestri, d'effets visuels toujours efficaces aujourd'hui et bien entendu de personnages forts, sincères et furieusement attachants.


Premier choix des créateurs mais bloqué sur la série Family Ties (Eric Stoltz jouera le rôle pendant quelques semaines avant d'être renvoyé, son interprétation étant jugée trop sérieuse et pas assez drôle), Michael J.Fox trouvera finalement un compromis (dont la conséquence sera un agenda extrêmement chargé) et interprètera le jeune héros avec une fougue, un humour, un naturel tout bonnement sidérants, l'associant à jamais à un rôle devenu mythique pour beaucoup de fans. A ses côtés, Christopher Lloyd (en remplacement de John Lithgow) en impose également en véritable pile électrique, composant un Doc Brown tout simplement inoubliable. On retiendra également les prestations de Lea Thompson en ado énamourée inconsciemment de son futur fils (ce qui fit forcément tiquer Disney), de Crispin Glover en futur papa maladroit et timide (et qui s'enfermera malheureusement dans ce genre de rôle) et surtout de Thomas F. Wilson, génial de bout en bout en brute épaisse.


Spectacle grand public ô combien fun et réjouissant, Back to the Future est également l'occasion pour Bob Gale et Robert Zemeckis de détourner malicieusement l'histoire de l'Amérique, de jouer avec son image et ses figures les plus mythiques, qu'il s'agisse de la cellule familiale, de us et coutumes de l'époque ou même du rock'n roll, élément important d'un film bien nostalgique. Une nostalgie jugée par certains limite réactionnaire, alors que pour ma part, la confrontation entre la banlieue crado des 80's et des années 50 sorties tout droit d'une vieille carte postale est à voir davantage comme un moyen de jouer avec l'image proprette et fantasmée d'une époque loin d'être aussi idyllique que ce que l'on raconte. Même chose en ce qui concerne les modifications extrêmement positives apportées par l'aventure du héros, plus proches pour moi d'un refus d'un fatalisme qui voudrait que tout doit forcément perdre de son éclat, que d'une morale reaganienne bien puante.


Classique parmi les classique, film culte en puissance bourré ras la gueule de séquences marquantes et à jamais gravées dans l'imaginaire collectif (à l'image de la DeLorean ou de certaines répliques), Back to the Future, malgré quelques maladresses et faux raccords, est une pure merveille à partager en famille, entre potes ou tout seul dans son coin comme un gros connard, peu importe. C'est un concentré de fun, de magie, d'humour et d'émotion que je pourrai me taper au moins soixante fois dans l'année sans jamais être lassé.

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le 9 mai 2016

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Gand-Alf

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