Il était une fois, dans un film de genre féministe, trois gros porcs. Et si la grande méchante louve avait de bonnes raisons d'aller souffler sur leurs maisons, symbole de leur force relative ?
Cette louve, c'est Jen, sex symbol par excellence. Belle poupée blonde au visage juvénile, son comportement est digne d'un film X. Elle se retrouve en huis clos dans une villa paradisiaque au milieu du désert avec trois hommes. Trois hommes, trois agresseurs, et bientôt trois cibles de sa vengeance.
Le film est construit comme une évolution. La poupée sans cervelle développe son caractère et son animalité. ''J'ai travaillé le personnage en deux parties distinctes, explique l'actrice Matilda Lutz, lors de la cinexpérience 84. D'abord dans son besoin d'amour et d'attention. Puis comme un animal, une panthère guidée par ses sens.'' Mais cette évolution touche également les hommes, poussés dans leurs retranchements. Toujours prêts à se raccrocher à ce qui construit leur virilité dans l'imaginaire collectif.
Revenge est comparable à un conte, de par sa dimension universelle. Ce désert pourrait être partout et nulle part dans une société occidentalisée, où les clichés et les genres ont été mis en place par des centaines d'années de conformation et dans la société de consommation. Mais c'est un conte d'une extrême violence. Première question dans la salle : ''Comment avez-vous fait pour que le film soit seulement interdit aux moins de 12 ans ?'' La réalisatrice estime que cette violence est justifiée par le propos. Personne ne s'étonne quand Coralie Forgeat cite Tarentino ou Cronenberg dans ses inspirations. Car esthétique du sang, et de la douleur traverse le film jusqu'à obscurcir le champ de vision.
Le désert prend de la couleur au fil de cette transformation. ''Le désert devient un personnage, confie la réalisatrice, toujours au cours de la 84ème cinexpérience. Il prend des couleurs plus vives, comme s'il reflétait l'enfer des personnages sortant d'eux-même.'' Ce désert, filmé au Maroc, devient un espace de jeu, univers de western, terrain de guerre, digne d'un jeu vidéo de survie. A son image, chaque personnage va révéler une nouvelle version de lui-même. Pour le meilleur ou pour le pire.
Le premier petit cochon se réfugie dans sa ruse. Sûr de sa supériorité, il ne se méfie pas assez. Elle souffle, il souffre. Le deuxième cochon se rassure dans sa voiture. Mais il ne survivra pas au duel. Enfin le loft avec piscine, dans laquelle le troisième petit cochon part se cacher, est toute de bleu et rose bonbon. Car ce cochon, c'est le partenaire de Jen. Leur opposition cristallise les rapports homme-femme dans ce qu'ils ont de plus malsain. Jusqu'à couvrir de sang la maison de briques.
Seule Jen se sublime au cours de la transformation. De Lolita à Lara Croft, elle a gagné en caractère, en sensations, en animalité. Elle devient un autre fantasme, celui d'une femme indépendante et fière. Une louve.