Michelle Rodriguez - The Movie

Revenger... ou The Assignment, ou (Re)Assignment (suivant le pays ou le site) est adapté de la BD Corps et Âme, scénarisée par Walter Hill (https://www.senscritique.com/bd/Corps_et_Ame/19711296) et mise en images par Jef.

Même histoire et scénario presque identique, le postulat de base commun aux deux œuvres est original et mérite à lui seul le détour, car il n'est pas traité sur le ton de la comédie. Oser faire du personnage principal un transsexuel (certes post-opératoire), c'est tout de même quelque chose qu'on ne voit pas souvent. Seules les Wachowski en sont capables !

Et maintenant Walter Hill, qui va ici un peu plus loin dans le questionnement du genre qu'il ne le faisait dans la BD. On pourrait regretter que le scénario, à la différence de l'histoire, ne sorte pas trop des sentiers battus, mais d'un autre côté, c'est ce qui peut nous faire prendre ce film comme un simple polar noir sur un tueur qui veut se venger ! En cela, il traite son héroïne comme n'importe quel protagoniste de film hard-boiled, et ça a quelque chose de réjouissant.

Michelle Rodriguez trouve là l'un des rôles de sa carrière. On la sent impliquée, elle donne de sa personne, et incarne le personnage du début (en homme) à la fin, lui donnant un corps, une démarche, une voix uniques. Le travail des maquilleurs n'est pas si mal (sauf pour le postiche de barbe du début qui est assez ignoble), mais c'est l'actrice qui le transcende par son jeu, surtout dans la deuxième partie. Elle nous fait véritablement percevoir l'homme qui habite ce corps de femme.
Deux bémols, peut-être :
1 - Malgré son excellent jeu, on aurait pu souhaiter voir une authentique transsexuelle dans le rôle (comme dans Sense8), mais c'eût été forcément moins vendeur.
2 - On aurait en tout cas aimé que Michelle Rodriguez ait le même traitement que Tom Cruise dans tous ses films : jouer face à des acteurs et actrices plus petits !
C'est parfois bizarre de se rendre compte que Frank Kitchen mesure 1m65 (même si les hommes de petite taille existent...).

Sinon, concernant la mise en scène, on retrouve un très beau travail sur les décors et les couleurs, comme dans la BD. Ici, la photographie est superbe et nous plonge dès les premières images dans l'ambiance du quartier du Tenderloin à San Francisco.

Les gunfights rappellent les autres films du réal (notamment Last Man Standing), avec un petit côté rétro pas désagréable. Plus désagréable et inutile est la voix off qui fait son apparition à la moitié du film... une voix off ne sert presque jamais à rien.

Mais la cerise sur le gâteau vient sans aucun doute de Sigourney Weaver, qui elle aussi habite et campe un personnage unique, tout aussi androgyne et fascinant que notre héroïne.

Revenger est loin d'être un chef d'oeuvre, sans doute trop "série B" pour cela, mais il fait drôlement bien le travail et il serait dommage de bouder un film qui ose aborder sérieusement des thématiques qui vont forcément laisser de côté un grand nombre de spectateurs.