Malgré son titre, ce film n’a strictement rien à voir avec un documentaire sur des athlètes se préparant pour les prochains Jeux Olympiques. Il s’agit du parcours de quelques adolescents d’Amérique centrale qui vont en direction des États-Unis à la recherche d’une vie décente.


Juan, Sara et Samuel ont 16 ans et partent du Guatemala. Le tout début nous présente Sara qui erre dans un bidonville. Elle s’enferme dans des toilettes à ciel ouvert pour, devant une glace de fortune, se couper les cheveux. Ensuite, elle retire son T-shirt et serre une large bande sur sa poitrine. Puis, elle humecte ses cheveux et les coiffe en arrière. Elle remet son T-shirt et ajuste une casquette sur sa tête. Désormais, elle peut se faire appeler Oswaldo.


Plus tard, Oswaldo-Sara se trouve au bord d’une voie ferrée en compagnie de Juan et Samuel. On ne sait pas comment ils ont fait connaissance, mais on apprend qu’ils veulent monter dans un train en marche, direction le Nord. Au premier train qui passe, ils mesurent le risque, même à vitesse réduite. On commence alors vraiment à évaluer la personnalité du réalisateur, car il préfère montrer les hésitations du trio que nous montrer une scène spectaculaire où les adolescents s’accrocheraient péniblement, trébucheraient, risqueraient l’accident, etc. Il enchaîne simplement avec un plan éloigné qui nous fait comprendre qu’ils ont fini par monter. De même, un peu plus tard, alors qu’ils sont sur le toit d’un wagon et que le train passe dans une zone boisée, il pourrait filmer frontalement en faisant sentir un péril avec des branches s’approchant, menaçantes. Non, il place sa caméra dans l’autre sens, montrant les passagers se baisser pour se protéger, l’effet étant que la végétation les caresse.
Cela correspond assez bien avec la vision d’une nature accueillante et presque protectrice. A l’image de l’affiche, elle reste belle (quelques magnifiques paysages), quels que soient les drames qui se jouent à la surface de la Terre.


Le voyage va se poursuivre, avec des péripéties aussi nombreuses que dramatiques. Les relations entre les adolescents vont évoluer au fil des événements. Les caractères se précisent. Il faut se nourrir, échapper aux contrôles et se méfier de personnes sans scrupules qu’ils trouvent sur leur chemin, prêtes à profiter de cette main d’œuvre tombée du ciel et qui n’imagine pas forcément quels trafics ils mènent. Heureusement, le film ménage quelques moments réjouissants entre quelques ignobles traquenards.


Aperçu en une phrase des intentions du réalisateur « Nous avons écrit cette histoire dans l’espoir de détruire les conventions qui nous emprisonnent, afin de réinventer notre propre réalité. » Un film peu bavard où ses intentions sont bien présentes et ressenties par le spectateur.


Illustration vis-à-vis des codes classiques de la narration cinématographique : avant la moitié du film, Sara est séparée des garçons. Autant le dire, j’ai longtemps attendu de ses nouvelles, espérant que les deux autres la rechercheraient. Mais ils n’avaient pas la moindre indication. Gros regret, car Sara est présentée depuis le début comme l’âme du groupe, même si Juan en est l’élément moteur. Sans elle, ce n’est plus la même chose, bien que son état d’esprit influence encore les comportements !


Pour son premier film (Prix « Un certain talent » au dernier festival de Cannes), Diego Quemada-Diez montre que la solidarité est indispensable pour s’en sortir. La morale (très dure) est qu’on part à plusieurs, le groupe se soude autour d’un but commun, nul n’ignorant que la réussite est incertaine. Celui qui parvient à destination porte en lui un rêve commun dont on espère qu’il fera quelque chose. Le voyage et ses compagnons l’ont certainement marqué à vie. L’ultime séquence montre un de ces rescapés au travail dans une usine de notre société de consommation qui se débarrasse sans ménagement de tout ce qui l’encombre (dégraissage...)


Magnifiquement soutenu par des interprètes inoubliables, le film montre à quel point le rêve de ces adolescents n’aboutit pas à un Eldorado. Comment se sont-ils fabriqués ce rêve ? Comment la situation générale va-t-elle évoluer ? Le réalisateur fait sentir la différence d’appréhension du monde entre les indiens et les occidentaux et il n’hésite pas à ménager quelques moments de pure poésie.


Pour ces jeunes (et moins jeunes), la frontière américaine est une réalité, mais juste un frein à leur objectif. Puisqu’ils considèrent que leur salut est derrière, ils n’ont qu’une idée, la franchir. Bien évidemment, tout le monde n’accepte pas cela. Confrontation terrible entre l’espoir des uns et la farouche défense de leurs acquis par les autres.

Electron
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le 6 déc. 2013

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