Le titre du documentaire est un peu bizarrement choisi si l'on considère qu'il ne s'agit ici qu'à peine de la vie de Richter. Certains détails y sont évoqués mais Monsaingeon décide de ne pas s'attarder trop lourdement dessus. Il y a quelques anecdotes croustillantes, comme le fait que Maria Yudina considérait Richter comme juste bon à jouer Rachmaninov, que Karajan et Rostropovitch était plus intéressés par les séances photos que par les répétitions ou encore que Glenn Gould était un fanboy de Richter... mais ce n'est pas vraiment ce qui retient l'attention.
Cette place limitée laissée au biographique s'avère un choix très judicieux puisque la place belle est laissée à la musique qui est après tout ce qui exprime le mieux la personnalité de Richter. Et de quelle musique s'agit-il!
Il y a bien sûr les pièces classiques du répertoire soliste, Liszt, Chopin, Schumann et consorts
Schubert et Haydn dont il a été un fervent défenseur
Les compositeurs dont il a créé les oeuvres, dont Prokofiev ou Shostakovich
Toutes ces collaborations avec certains des plus grands, Oistrakh, Britten, Walter...
Le documentaire ne donnerait que cela à entendre, ce serait déjà par mal, mais il y a aussi les commentaires de Richter lui-même, à la fois détaché et lucide, intense et sarcastique. Ses interventions donnent à voir quelqu'un qui a vécu de musique passionnément et s'est toujours efforcé de regarder avec exigence son propre art. Le film se termine par une déclaration incroyablement poignante d'un Richter qui affirme qu'en gros il ne s'aime pas. Quand on voit tout ce précède on se demande bien comment c'est même possible!