Un film que je ne peux pas m'empêcher d'apprécier, en dépit de ses gros défauts qui me sautent aux yeux, sans parvenir à altérer mon plaisir.
Il faut dire que j'ai découvert "Rive droite, rive gauche", dans mes très jeunes années, un soir devant Ciné Dimanche, et qu'en bon petit provincial j'avais été ébloui par l'élégance majestueuse de la capitale, que Labro filme avec amour, à l'image de ce travelling introductif longeant les quais de Seine, sur la belle musique inquiétante de Michel Berger.
Et puis au-delà de la splendeur de l'architecture parisienne (les divers monuments, les avenues, les ponts, la place de la Concorde déserte au petit matin...), il y a l'univers prestigieux des élites économiques, politiques et médiatiques ; cet avocat qui évolue dans les hautes sphères, fréquente les endroits à la mode, séduit les plus belles femmes...
Tout cet apparat des quartiers chics, du Paris des affaires, avait fasciné le gamin naïf que j'étais, et aujourd'hui encore la magie opère... du moins un peu!
Car avec le recul, le manque de subtilité de Philippe Labro apparaît manifeste : que de situations outrancières, de comportements excessifs, de dialogues artificiels... Voire d'invraisemblances flagrantes, comme cet assassinat en pleine rue, au milieu des bouchons.
Le scénario n'est pas vraiment à la hauteur du décor, avec une intrigue politico-industrielle assez simpliste - même si Labro vise parfois juste, sur la question du financement des partis notamment.
Mais le mélange des genres fonctionne plutôt bien, avec en parallèle une chronique de mœurs, une romance assez mignonne, et quelques éléments de thriller paranoïaque.
En revanche, aucun aspect n'est réellement traité en profondeur, et en particulier les différences sociologiques entre les deux rives, implicitement promises par le titre.
L'ensemble apparaît parfois boursouflé, inutilement lourd, dénué de finesse et d'authenticité, à l'image de l'interview télévisée lunaire (pourtant Labro est un homme de médias!).
Dès lors, on peut sans doute imaginer que certaines outrances seraient volontaires, histoire d'accentuer l'aspect satirique du récit.
Le gros point fort du film réside dans sa distribution, à commencer par la belle alchimie entre Gérard Depardieu (encore beau et mince) et Nathalie Baye (bien jolie à cette époque, où la ressemblance avec Laura Smet est flagrante), qui se retrouvent trois ans après "Le retour de Martin Guerre".
Les seconds rôles se montrent également à leur avantage, incarnés par de bons comédiens tels que Bernard Fresson, Carole Bouquet, Jacques Weber, ou encore Charlotte de Turckheim.
"Rive droite, rive gauche" reste donc un film que je revois toujours avec plaisir, un univers agréable et superficiel dans lequel je me replonge avec nostalgie.
Du coup je n'hésite pas à surnoter, d'autant que la moyenne SC me paraît un peu sévère.